La Liberté

Les pouvoirs du scénarium

L'article en ligne - Fiction - Aujourd’hui, la Page Jeunes vous apprend un mot nouveau, qui vous fera briller dans les débats houleux sur votre série préférée ou la dernière sortie ciné.

Gwen Stacy, qui, dans « The Amazing Spider-Man », se brise la nuque, ou pas, dans deux chutes similaires, pourrait bien avoir une colonne vertébrale en scénarium. © Sony Pictures
Gwen Stacy, qui, dans « The Amazing Spider-Man », se brise la nuque, ou pas, dans deux chutes similaires, pourrait bien avoir une colonne vertébrale en scénarium. © Sony Pictures

Aurélie BAVAUD

Publié le 16.10.2017

Temps de lecture estimé : 2 minutes

Laissez-moi vous parler d’un matériau merveilleux. Tout à la fois flexible ou rigide, dur ou mou, c’est l’étoffe dont sont fait les héros. Il puise sa force dans la fainéantise et l’inexpérience des scénaristes et autres raconteurs.

Il est aussi ancien que les histoires le sont. Ceux qui auront subi, au collège ou à l’uni, des cours de littérature médiévale, se souviendront sûrement de chevaux coupés en deux en un coup d’épée, d’Érec sauvant Énide alors qu’il avait été laissé pour mort sur la table de la cuisine, et autres joyeusetés. Et l’on pourrait certainement remonter encore plus loin.

Mais s’il semble tout droit sortir du tableau périodique des éléments, ce matériau est bel et bien fictif. C’est le scénarium. Ceux qui fréquente l’internet anglophone, le connaissent peut-être aussi sous le nom de « plot armor » (littéralement, « armure d’intrigue »). C’est ce qui protège le héros quand une armée entière de stormtrooper fait feu, et lui permet de survivre à des coups qui aurait tué n’importe qui dans la réalité, ou qui le blesse juste au moment opportun. C’est Cassian Andor se brisant la nuque après une chute de plusieurs dizaines de mètres puis réapparaissant dix minutes plus tard en boitant un peu, dans « Rogue One ». C’est dix types qui combattent plusieurs milliers de morts-vivants sur un lac gelé, mais seuls ceux qui ont eu le droit à une ligne de dialogue dans les scènes précédentes survivent (sauf un, peut-être, pour la petite larme). On pourrait citer des dizaines d’autres exemples, la moitié tirée de « 2012 » et autres films catastrophes, mais on va s’arrêter là. Le scénarium, c’est un peu comme le « Deus Ex Machina » ; une réponse des scénaristes peu scrupuleux aux impasses que peuvent présenter leurs intrigues. 

L’expression a été popularisée par l’émission « Aventure » de la chaîne Bazar du Grenier, dont les amateurs de jeu de rôles parmi nos lecteurs seront peut-être familiers. Et comme tous les mots un peu nouveaux et nés sur internet, sa définition est un peu fluctuante. Il peut aussi bien décrire la matière dont sont faits le personnage ou une partie de son corps, une armure symbolique qu’il porterait, que le rebondissement dont il est la victime. Bref, peu importe sa forme, le scénarium, c’est ce produit irritant qui suinte de chaque péripétie suffisamment improbable pour vous faire sortir d’un film.

Articles les plus lus
Dans la même rubrique
La Liberté - Bd de Pérolles 42 / 1700 Fribourg
Tél: +41 26 426 44 11