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Alimentation sous contrôle

Les troubles du comportement alimentaire peuvent avoir un impact important sur la vie estudiantine. Témoignage

Les normes sociales actuelles valorisent le fait de perdre du poids. © Héloïse Hess/photo prétexte
Les normes sociales actuelles valorisent le fait de perdre du poids. © Héloïse Hess/photo prétexte

Franck Descloux

Publié le 20.05.2023

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Santé » Les troubles du comportement alimentaire (TCA) touchent beaucoup de jeunes, mais il est parfois difficile de saisir l’ampleur des conséquences qu’ils engendrent, en particulier en milieu scolaire.

Pour Audrey Jacomet, 24 ans, étudiante à l’Université de Fribourg, les premiers symptômes des TCA se sont manifestés au début d’un régime: «J’ai banni les aliments gras de mes repas et me suis mise à privilégier les salades», commence-t-elle. L’habitante de Chénens se souvient avoir dû noter son poids dans un cahier: «L’euphorie de constater que je perdais des kilos m’a incitée à poursuivre la démarche.»

«L’euphorie de constater que je perdais des kilos m’a incitée à poursuivre la démarche.»
Audrey Jacomet

Ses nombreuses activités physiques et le contrôle accru de son alimentation influencent progressivement sa vie d’étudiante. Son hyperactivité l’a exténuée et son temps consacré au travail universitaire s’est considérablement réduit: «Quand bien même je réussissais à m’y mettre, je pensais constamment à la nourriture», se remémore la jeune femme.

«Toutes mes journées étaient rythmées par le sport et les heures de repas. Cela devenait compliqué de parer à l’imprévu ou d’aller au restaurant sur un coup de tête», explique Audrey. En parallèle, la jeune femme évoque une dualité interne entre une volonté de résister à la maladie et l’accaparement de cette dernière sur son esprit: «C’est en quelque sorte une dictature. Même si je voulais faire autrement, la maladie me l’empêchait», complète l’étudiante.

Mieux accueillir la parole

Nathalie Pasquier, diététicienne à Fribourg, y voit un cercle vicieux: «Lorsqu’une personne perd le contrôle d’un aspect de sa vie personnelle, elle peut tenter de reprendre la main en s’interrogeant sur son alimentation», explique-t-elle.

«Il y a une mission d’éducation à mener dès le plus jeune âge pour parvenir à repenser la place du corps.»
Nathalie Pasquier

La spécialiste pointe le fait que le stress engendré par une surcharge de travail peut mener à un état d’anxiété, favorable au développement de TCA. Néanmoins, elle ne néglige pas le rôle que jouent les normes sociales autour de la minceur: «Aujourd’hui, il est plutôt valorisé de perdre du poids», constate la diététicienne. Elle estime ces considérations dépassées: «Il y a une mission d’éducation à mener dès le plus jeune âge pour parvenir à repenser la place du corps. Tout le monde doit être à l’aise avec le sien et peut en parler», complète Nathalie Pasquier.

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Des lieux d’écoute et d’aide, c’est ce qu’aurait aimé trouver Audrey Jacomet sur son lieu d’études: «Les TCA sont peu visibles mais en réalité, beaucoup de jeunes en souffrent. Partager ses douleurs et son ressenti dans des groupes de parole permet de sortir de l’isolement», pense l’étudiante. Ces groupes lui apparaissent complémentaires d’un suivi psychologique ou nutritionnel: «Etre vigilante sans cesse est dur car la maladie revient à la moindre faiblesse. Seule, cela n’est pas possible de la combattre efficacement», conclut Audrey.

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