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Fribourg, ville bilingue?

A part quelques initiatives locales, la cohabitation des langues reste difficile et sujette à tensions. Témoignages

Fribourg, ville bilingue?
Fribourg, ville bilingue?

Lise Schaller

Publié le 13.09.2021

Temps de lecture estimé : 2 minutes

Dialogue » Les Fribourgeoises Jane Seewer et Constance du Réau, 25 ans, sont toutes deux titulaires d’une maturité gymnasiale bilingue. Bilingues, elles le sont devenues durant leur enfance: si Jane, germanophone, a appris le français en étant constamment en contact avec la langue de Molière en ville de Fribourg, Constance parlait français à la maison et a été scolarisée en allemand par ses parents – chose pour laquelle ils ont dû engager un avocat: «il faut exploiter la chance que nous avons de vivre dans une ville bilingue», exprime-t-elle. Jane souligne l’échange culturel que permet le bilinguisme: «la Suisse ne s’arrête pas au Röstigraben. Le bilinguisme est une chance!» Cependant, Constance s’interroge: «Où sont les preuves que Fribourg est vraiment bilingue?»

Et de fait, la ville de Fribourg est officiellement francophone, comme le rappelle Philippe Humbert, chercheur postdoctoral à l’Institut de plurilinguisme: «L’administration communale n’est pas obligée de garantir des échanges en allemand. Mais elle propose quand même certains services et documents dans cette langue.»

Peu encouragé

Jane et Constance, quant à elles, déplorent le manque d’encouragement au bilinguisme à l’école obligatoire. «De nombreux Suisses alémaniques parlaient déjà français à l’école, mais le cursus ne l’a pas pris en compte», raconte Jane. A part quelques initiatives locales telles que l’ouverture de deux classes bilingues en 1H/2H à la Vignettaz, les projets promouvant les échanges entre Suisses alémaniques et Suisses romands au niveau scolaire en ville de Fribourg sont rares. Mais derrière l’apparent manque de volonté se cachent des problèmes bien réels, comme l’indique Philippe Humbert: «Nous faisons face à des problèmes institutionnels. Il n’existe par exemple pas de plan d’étude bilingue, mais un Plan d’études romand et un Lehrplan 21.» D’après lui, il n’est cependant pas uniquement question de langue: «C’est à l’école que se cristallisent les questions politiques. On constate encore des tensions autour de la question du bilinguisme car il nécessite une éducation et un cadre institutionnel différents.»

Constance relève elle aussi des frictions entre locuteurs francophones et germanophones: «les élèves alémaniques et romands ne s’appréciaient pas et les enseignants ne faisaient aucun effort pour arranger la situation», regrette-t-elle. Et Jane d’ajouter: «L’ouverture d’esprit et la tolérance devraient commencer à la place de jeux.» Si les deux Fribourgeoises soulignent les aspects enrichissants du bilinguisme, Philippe Humbert nuance: «Le bilinguisme est très à la mode actuellement, mais il n’est pas une potion magique.» Pas de consensus non plus autour de l’éternelle question du dialecte: «Le bilinguisme englobe-t-il également le suisse allemand? Tout le monde n’a pas la même représentation de ce que signifie être bilingue.»

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