La Liberté

«Ici, c’est un massacre»

Noé Mühlemann, jeune Fribourgeois établi au Chili depuis deux ans, décrit les manifestations qui y font rage depuis le mois d’octobre

Elsa Rohrbasser

Publié le 09.12.2019

Temps de lecture estimé : 2 minutes

Témoignage » En 2017, Noé Mühlemann part en voyage pour découvrir l’Amérique du Sud. Mais arrivé au Chili, il rencontre celle qui allait devenir sa femme. Le Fribourgeois a 23 ans aujourd’hui: «J’ai décidé de rester ici, à Santiago. Avec ma femme, nous travaillons en indépendants sur un projet touristique.»

La crainte de représailles en raison des tensions politiques et sociales que traverse actuellement le Chili ne le retient pas de témoigner. En effet, depuis le mois d’octobre, les manifestations se succèdent: «Tout a commencé par la hausse du prix des tickets de métro. Pour protester, des étudiants ont décidé de frauder dans les transports publics», raconte Noé. Si les manifestations étaient pacifiques au départ, la situation a vite dégénéré. «La police est venue, elle a tiré avec des balles de plomb. Une étudiante a été tuée», déplore-t-il.

Menaces

Depuis ces premiers débordements, les revendications des manifestants ne cessent de se multiplier: «Le système de santé est mauvais, la vie est trop chère, les retraites des personnes âgées ne suffisent pas à vivre dignement et il y a de la corruption», s’indigne Noé. Selon lui, le gouvernement n’écoute pas les revendications des manifestants.

Après les premières manifestations, le président Sebastián Piñera a mis en place un couvre-feu et a déployé des soldats en ville. Depuis, les violences vont crescendo à Santiago: «J’ai vu des policiers écraser des manifestants, tirer sur eux. Certains se font enlever et torturer, c’est arrivé à un ami à moi. Et il y a beaucoup de viols», détaille Noé. «Mon ami a pu s’en sortir. Mais de nombreuses personnes sont encore portées disparues aujourd’hui», ajoute-t-il. «Si les manifestants deviennent violents, ce n’est que pour se défendre. Et ce sont des cailloux contre des fusils», défend le jeune Fribourgeois.

Sur Facebook, il partage des photos et des vidéos des événements afin que les images des manifestations soient vues au-delà des frontières du Chili: «Ma femme et moi avons reçu des menaces de mort, parce que nous partageons des images de ce qui se passe ici. Elles sont anonymes, mais je pense que ça vient du gouvernement», estime-t-il.

Inquiétude

Pour Noé, la situation est dramatique: «Selon les chiffres officiels, il y aurait pour l’instant 42 morts, 260 personnes disparues, une trentaine de viols. Mais ici, on parle d’environ 90 viols, de femmes comme d’hommes. On a retrouvé des centres de torture dans des supermarchés et des stations de métro, où sévit la police. Et tous les jours, des gens disparaissent! Ce qui se passe ici, c’est un massacre», s’alarme-t-il.

Noé ne cache pas son inquiétude face à l’avenir. Son couple attend des jumeaux et les tensions sociales compliquent énormément de choses: «C’est très difficile de travailler en ce moment, et de pouvoir consulter un médecin aussi. On essaie de s’en sortir comme on peut, mais c’est vraiment dur.»

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