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Pression de faire des études

Malgré la qualité des apprentissages et des passerelles disponibles, les élèves de prégymnasiale sont poussés à aller au collège. Témoignages

Les études restent davantage valorisées que les apprentissages auprès des élèves de prégymnasiale. © Héloïse Hess
Les études restent davantage valorisées que les apprentissages auprès des élèves de prégymnasiale. © Héloïse Hess

Nastasia Jeanneret

Publié le 19.10.2021

Temps de lecture estimé : 2 minutes

Formation » Damien Baechler, 24 ans, rêve depuis l’enfantine de devenir paysan. Durant son cycle d’orientation à Morat, il s’est heurté à des regards dévalorisants: «J’étais dénigré par les autres élèves et le corps enseignant. On m’appelait le paysan, comme si c’était quelque chose de pas bien.»

Les attentes de son entourage et de l’école ont augmenté lorsqu’il est passé de classe générale à prégymnasiale: «J’étais sûr de vouloir faire paysan, mais tout le monde me le déconseillait. On me disait que je ne pouvais pas faire ça, qu’il fallait que je fasse des études.» Même sa conseillère en orientation l’a découragé: «Elle m’a dit que c’était un métier de pauvre. Pour elle, ce n’était pas possible de faire ça après la prégymnasiale.»

Portes ouvertes

Thomas Di Falco, chef du service de l’orientation professionnelle de Fribourg, précise le rôle des conseillers en orientation: «Nous ne sommes pas des orienteurs qui dirigent les élèves là où il y a besoin de monde. Le but est de les aider à choisir eux-mêmes une formation correspondant à leurs intérêts, leurs valeurs et leurs compétences propres. Il ne s’agit en aucun cas de prendre des décisions à leur place ou de les influencer.»

Il constate toutefois que la pression des enseignants et des parents reste importante: «Chaque année, des jeunes trouvent des places d’apprentissage, mais, au moment de signer, les parents décident qu’ils iront au collège. Pourtant, on répète que toutes les portes restent tout le temps ouvertes.»

Le parcours de Camille Vial, 26 ans, en est un bel exemple. Suite à quatre ans de collège et un semestre universitaire, la jeune Fribourgeoise a commencé un apprentissage: «Une spécialiste en orientation m’a suggéré une école en restauration d’art. En cherchant un stage pour y entrer, je suis tombée chez un ébéniste qui m’a engagée pour une semaine. J’ai adoré et j’y ai commencé un apprentissage.»

Après quoi elle a travaillé deux ans en menuiserie, puis commencé l’école supérieure en conservation et restauration: «Au terme de mon apprentissage, je pensais ne plus jamais refaire d’études. Mais après deux ans de travail, j’avais à nouveau l’envie d’apprendre.»

L’intellect dans le manuel

Dépasser la distinction entre métiers intellectuels et manuels est essentiel selon Camille: «Il faut être malin dans le métier d’ébéniste, car il y a toujours moyen d’être plus efficace, plus logique, plus propre. C’est un peu une gymnastique intellectuelle.»

Aujourd’hui agriculteur, Damien pense aussi que la dimension mentale du métier est sous-estimée: «Beaucoup de gens perçoivent le métier de paysan comme étant bête. Ils pensent que l’on monte sur notre tracteur, fait le tour du champ et ça s’arrête là. En réalité, il faut continuellement calculer, peser les prises de risque. C’est un métier beaucoup plus intellectuel que ce que l’on croit.»

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