La Liberté

Terre d’asile temporaire

Ils vivaient à Kherson, Odessa ou Slavoutytch et depuis que leur vie a basculé, ils ont trouvé refuge dans le canton. Témoignages

Natalia pose dans l’objectif d’Oksana, photographe professionnelle ukrainienne et mère de Rostislav. © Oksana Nedilnichenko
Natalia pose dans l’objectif d’Oksana, photographe professionnelle ukrainienne et mère de Rostislav. © Oksana Nedilnichenko

Noé Vonlanthen

Publié le 04.09.2022

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Ukraine » Au cœur de la zone industrielle de Givisiez se dresse un grand immeuble noir. Devant ce dernier, des dizaines de colonnes de boîtes aux lettres portent toutes un nom à consonance slave. C’est un petit bout d’Ukraine en Suisse, un village artificiel dont les habitants ont en commun d’avoir choisi Fribourg comme terre d’asile.

C’est ici que vit depuis trois mois Rostislav Nedilnichenko, 12 ans. Il a fui la guerre avec sa mère et est arrivé à Fribourg le jour de son anniversaire: un signe selon lui. En Ukraine, il jouait du piano, de la flûte et du violon. Il a dû abandonner ses instruments en fuyant, mais un professeur du Conservatoire lui a offert un clavier pour qu’il puisse continuer à progresser. Il s’est inscrit au Conservatoire et, comme une quarantaine d’Ukrainiens, va commencer l’école secondaire à Fribourg. Il a un peu peur, mais ses premières expériences en ville ont été positives: «Quand je cherchais un magasin, les gens m’ont aidé et ils ont été très gentils avec moi.» Selon lui, les gens sont plus ouverts qu’en Ukraine: «Ici, on n’est pas jugé, qu’importe notre coupe de cheveux ou notre couleur de peau!» Quand on lui demande de décrire Fribourg, Rostislav, du haut de ses 12 ans, a des mots choisis: «Le calme et la liberté.»

«Fribourg? Le calme et la liberté»
Rostislav Nedilnichenko

Le français comme passion

Natalia Klymiv, elle, a 27 ans. Elle vient de Kherson, ville encore occupée par les forces russes. Sa famille y est restée car ses grands-parents étaient trop âgés pour fuir. Quand elle en parle, son visage s’assombrit. Pour elle, ce qui l’a sauvée de la tristesse, c’est le français: «C’est ma passion, j’y consacre entre cinq et six heures par jour. Deux fois par semaine, il y a un cours à la maison (à Givisiez, ndlr) et le reste du temps, je suis des cours en ligne.» Pour s’améliorer, elle lit beaucoup et écoute des émissions.

Elle a commencé il y a moins de trois mois mais s’exprime déjà dans un français courant. Natalia a aussi assisté à des cours en plein air aux Grand-Places, à Fribourg. Elle trouve que la ville est très belle et elle s’y sent bien, mais Kherson lui manque, et elle espère y rentrer bientôt.

Cette idée que l’exil sera court est très ancrée dans l’esprit des Ukrainiens. Selon Carole Angéloz, membre de la cellule école et formation de l’état-major Ulysse pour l’école obligatoire, c’est l’une des difficultés principales dans le processus d’intégration des jeunes. Certains parents privilégieraient en effet une scolarisation à domicile en vue d’un retour prochain, alors que rejoindre une classe est souvent grandement bénéfique pour les jeunes.

«Au fond, il ne manque que la mer»
Une Ukrainienne

Parmi ceux présents ce jour-là, tous ont un avis bien tranché sur Fribourg: «En tout cas c’est mieux que Genève, c’est plus calme», s’exclame une jeune fille d’Odessa. «J’aime me balader au bord de la Sarine», ajoute une de ses amies. «Au fond, il ne manque que la mer», conclut-elle avec un sourire.

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