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Et boum! Les eusauropodes dominent

Un changement climatique et une intense activité volcanique ont permis l’hégémonie de ces herbivores

Un changement majeur dans la faune des dinosaures herbivores et dans la flore a été constaté dans les couches sédimentaires d’une région de Patagonie. Il est concomitant avec une grande activité volcanique (ici le Popocatepetl en 2003, qui se trouve par ailleurs au Mexique). Keystone-archives/photo prétexte
Un changement majeur dans la faune des dinosaures herbivores et dans la flore a été constaté dans les couches sédimentaires d’une région de Patagonie. Il est concomitant avec une grande activité volcanique (ici le Popocatepetl en 2003, qui se trouve par ailleurs au Mexique). Keystone-archives/photo prétexte
Publié le 24.11.2020

Temps de lecture estimé : 4 minutes

Paléontologie » Un changement climatique coïncidant avec une intense activité volcanique a assis la domination des eusauropodes, il y a 180 millions d’années, selon une étude parue récemment. Ces dinosaures à long cou font partie des grands herbivores ayant vécu sur la planète. Ils sont issus du sous-ordre sauropodomorpha, qui va développer ses lignées depuis environ 230 millions d’années, pendant l’ère géologique du trias, avec des espèces toutes herbivores mais très diverses, d’un poids allant de 10 kg à plus de cinq tonnes.

Soixante millions d’années plus tard, au milieu de l’ère du jurassique, la seule lignée survivante est l’eusauropode (le «vrai sauropode»). L’étude du paléontologue argentin Diego Pol et de ses collègues, parue dans les Proceedings of the Royal Society, «montre que la domination des eusauropodes est survenue après un événement magmatique (volcanique) massif, touchant le sud du Gondwana», un des deux supercontinents de l’époque, il y a environ 180 millions d’années.

Bagualia alba

L’eusauropode est emblématique de deux extinctions de masse: celle intervenue à la charnière du trias et du jurassique lui assure la domination chez les herbivores; celle qui interviendra il y a 66 millions d’années, généralement attribuée à l’impact d’une météorite ayant bouleversé le climat, marquera sa disparition et celle de tous les dinosaures.

Jusqu’à leur disparition, les eusauropodes seront les plus gros animaux terrestres. Les plus petits d’entre eux faisaient 10 mètres de long, mais la plupart atteignaient 15 à 20 mètres, pour un poids de huit à seize tonnes, selon le Département de géologie de l’Université du Maryland.

L’équipe de Diego Pol affirme avoir découvert «le plus ancien eusauropode connu à ce jour, avec un crâne presque complet». Baptisé Bagualia alba, vieux de 179 millions d’années, il a été mis au jour dans une région de Patagonie, Chubut, riche en fossiles de l’époque. Son âge marque «le début d’une faune dominée par les eusauropodes dans ce bassin», selon l’étude. Or, les couches sédimentaires de l’endroit, le bassin Canadon Asfalto, «enregistrent un changement majeur dans la faune des dinosaures herbivores, ainsi que des changements de la flore et de l’environnement», concomitants avec des épisodes volcaniques majeurs.

La flore d’origine, mêlant prèles, fougères, conifères et plantes à graines, se plaisait dans des conditions humides. Mais les températures ont monté et la sécheresse s’est faite saisonnière, favorisant la domination de conifères à petites feuilles en écailles. Le phénomène est survenu aussi dans l’hémisphère Nord à cette époque, selon l’étude.

«Sélection sévère»

Le changement a favorisé Bagualia alba et ses congénères. Un long cou leur permettait d’atteindre facilement tout feuillage. Leur grosse taille facilitait, grâce à celle de leur estomac, la digestion de fibres. Surtout, leur dentition, avec des mandibules robustes, des dents épaisses et larges de plusieurs centimètres, s’est adaptée à un régime alimentaire de feuilles coriaces, dures et fibreuses.

Cet environnement «a sans doute agi comme un régime de sélection sévère favorisant la survie et le succès des eusauropodes», selon l’étude. Inversement, il a sans doute contribué à l’extinction des lignées d’herbivores de plus petite taille, dont l’appareil dentaire était peu adapté à ce nouveau régime. Comme Leonerasaurus, un petit sauropode d’environ 2,5 m de long découvert dans la même région de Patagonie que Bagualia alba.

Pour Diego Pol et ses collègues, leur découverte «est peut-être la première preuve documentée des interactions entre plantes et herbivores dans l’évolution des dinosaures». Ils supposent aussi, compte tenu de la présence de la végétation de conifères et de la population de ces dinosaures sur terre, que cette interaction constatée dans l’actuelle Patagonie ait reflété un événement global. ATS/AFP

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