Les courses épiques
Etudiés par les ethnologues, investis par les artistes, les supermarchés sont parmi les derniers lieux publics accessibles. Et la visite de ces temples consuméristes semble aujourd’hui plus ritualisée que jamais
Gilles Labarthe
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En comparaison avec d’autres pays, la véritable histoire d’amour que les Suisses entretiennent avec leurs supermarchés ne cesse d’intriguer les chercheurs universitaires en sciences humaines. En temps normal, en Suisse, «faire ses courses» tient déjà du rituel presque journalier, ou au moins hebdomadaire. En ces temps de pandémie de Covid-19 et de confinement anxiogène, ce rituel est-il toujours le même? Les mesures de confinement sont-elles l’occasion de porter un autre regard sur nos croyances, normes et pratiques dans les grandes surfaces d’alimentation?
Les anthropologues insistent sur le fait que l’espace même des supermarchés est singulier: il est «construit» socioculturellement. Autrement dit, il «ne va pas de soi». Certains chercheurs ont par exemple été intrigués par la nette tendance de nombreux usagers à