La Liberté

Des idées de lendemains de bruine…

Louis ­Ruffieux

Publié le 10.03.2018

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Opinion

Marre de toujours perdre, changeons les règles du jeu! Econduite dimanche pour la septième fois depuis 1996 dans sa volonté de réintégrer le Conseil d’Etat fribourgeois, l’UDC en colère remet au goût du jour des idées déjà éprouvées ou rejetées.

Candidat malheureux, le président de l’UDC a lancé un ultimatum aux libéraux-radicaux et surtout aux démocrates-chrétiens, sommés de sacrifier l’un de leurs trois conseillers d’Etat pour laisser place à un agrarien lors des prochaines élections. Ruedi Schläfli souhaite que le PLR et le PDC s’engagent rapidement à garantir l’accession d’un UDC au gouvernement en 2021, donc sans même connaître le candidat et son degré d’acceptabilité dans les urnes. Cela s’appelle faire un conseiller d’Etat dans le dos du peuple, non? En fait, le PAI (ancêtre de l’UDC) a déjà bénéficié de cette stratégie en 1971, à la nuance près que son candidat était alors agréé par le PDC qui l’hébergeait sur sa liste pour le Conseil d’Etat, avec garantie de résultat. Il s’agissait de Joseph Cottet, élu grâce au retrait du PDC Edouard Gremaud qui le précédait au premier tour. Cinq ans plus tard, M. Cottet fut réélu sans artifice sur la liste commune. Mais il ne le fut plus en 1981, quand le PDC le lâcha pour réduire ses propres ambitions gouvernementales.

Dans l’amertume, l’UDC songe aussi à une initiative pour l’élection de l’exécutif au système proportionnel. La représentation proportionnelle favorise les partis, le système majoritaire en vigueur consacre davantage les personnalités.

«Le cap majoritaire demeure le véritable baptême de l’homme d’Etat», disait en 1981 le président du PDC Martin Nicoulin. Il combattait alors une initiative demandant déjà la proportionnelle. Elle émanait du PS, ulcéré par l’éviction en 1976 de ses deux premiers conseillers d’Etat. Pour torpiller l’initiative, gouvernement et Grand Conseil lancèrent un contre-projet qui maintenait le système majoritaire, mais le limitait en prévoyant qu’un parti qui n’a pas la majorité au parlement ne peut l’avoir au Conseil d’Etat. Le peuple rejeta l’initiative (56,3% de non) et le contre-projet (54,9%), mais le PDC s’autolimita: dès la fin 1981, il renonça à sa majorité absolue à l’Exécutif.

A l’époque, le PAI-UDC combattit l’initiative. A l’époque, le PS dénonçait «l’accaparement» du pouvoir par le PDC, qui comptait quatre conseillers d’Etat alors qu’il n’avait que 44% des députés. Plus tard, en 2013, après la démission de la conseillère d’Etat PDC Isabelle Chassot, le PS (26,4% des députés) changea de credo: il tenta de gagner un troisième siège et, du coup, la majorité absolue de l’exécutif pour la gauche (trois PS, une verte) forte d’une députation ne représentant… qu’un tiers du Parlement.

Opportunisme, parjures, versatilité des partis? «Ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent», plaidait Edgar Faure pour la défense du monde politique. Après-demain, qui sait, peut-être verra-t-on le PDC se battre pour le système proportionnel, histoire d’achever la rotation complète, sur le carrousel des partis, d’une idée qui aide à vivre les lendemains de bruine électorale…

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