La Liberté

Est-elle toujours conseillère fédérale?

Publié le 24.02.2018

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Opinion

Tout, tout de suite! La «dictature de l’immédiateté», exacerbée par les supports numériques de l’instantanéité, n’épargne pas les médias. Ils y font allégeance par crainte d’être en retard dans la divulgation d’une information, pour affirmer leurs capacités réactives ou par obligation de meubler du temps d’antenne, le pire étant l’apanage des chaînes d’information en continu au verbiage souvent aussi vide que répétitif. Mais il y a plus fort que le culte de l’immédiateté qui, par définition, ne laisse que peu de temps à la réflexion et à la mise en perspective des faits: l’information d’anticipation, fondée sur un bruit, une rumeur, une spéculation. Bel exemple, cette semaine, avec le feuilleton «Doris Leut­hard sur le départ», ou comment développer une information jusque dans ses conséquences lointaines avant même qu’elle soit avérée.

Doyenne de fonction du Conseil fédéral, Doris Leuthard le quittera bientôt. Elle-même l’a annoncé l’an dernier, fixant l’échéance ultime à la fin 2019. Doris Leuthard pourrait démissionner au début du mois prochain, après la votation sur No Billag qu’elle va sans doute gagner. Sur ces bruissements annonciateurs d’un mouvement, sur ce conditionnel, s’est aussitôt construit le futur. Lundi déjà, La Première citait une demi-douzaine de «papables» pour remplacer la démocrate-chrétienne, recensant leurs qualités et leurs points faibles. Problème: ces potentiels membres du gouvernement sont très majoritairement des hommes. Débat immédiat: un Conseil fédéral ne comptant plus qu’une femme sur sept, serait-ce acceptable?

A ce stade, Doris Leuthard est donc déjà effacée de la photo du Conseil fédéral. Mais voici l’étape suivante, l’avenir supposé de la magistrate hypothétiquement à la retraite. C’est qu’il fait problème. Selon un quotidien alémanique, elle serait pressentie pour la présidence suisse de la Banque Raiffeisen. Est-ce bien, est-ce mal, est-ce son rôle, est-ce sa place, est-ce comparable avec la présidence d’UBS occupée par Kaspar Villiger après son retrait du Conseil fédéral? Et mouline le moulin, et s’emballe le bal des endimancheurs d’une réalité en habit de semaine – une actualité banale, sans démission de Mme Leuthard et, bien sûr, sans communication aucune sur son occupation future au cas où.

Car à ce jour et à notre connaissance très lacunaire, Doris Leuthard est toujours conseillère fédérale en charge du Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication. Son vrai départ, début mars ou plus tard, réajustera les pendules des temps politique et médiatique, et relancera le cortège des spéculations sur sa succession et son avenir personnel, dans une chorégraphie désormais bien rodée qui peut vous occuper tout un été (remplacement de Didier Burkhalter en 2017). Et quand Mme Leuthard démissionnera vraiment, peut-être apprendrons-nous enfin ce qui lui est promis quand elle quittera la présidence de la Banque Raiffeisen…

Articles les plus lus
La Liberté - Bd de Pérolles 42 / 1700 Fribourg
Tél: +41 26 426 44 11