Binge-watcheuse anonyme
Page Jeunes - C'est tendance! • Regarder frénétiquement les épisodes d’une série les uns après les autres jusqu’à ne plus sortir de chez soi. Tel est le symptôme principal du «binge-watching», une addiction qui fait de nombreuses victimes. La Page Jeunes brise le tabou.
Marielle Savoy
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«Je m’appelle Josette. - «Bonjour, Josette!» - Je suis tombée dans le binge-watching (ou gavage télévisuel) en décembre 2010. C’était un jour gris et froid, entre Noël et Nouvel An. Pour pallier mon ennui, j’ai commencé à regarder «Dexter». Quelques minutes plus tard, je m’étais procuré la cinquantaine d’épisodes de 55 minutes de cette série qui - tout le drame est là - avait vu le jour bien avant le début de mon ennui. «Si ça se trouve ça va pas me plaire. Ça parle d’un tueur en série et j’ai peur du sang.» Raté.
»Oh, «Dexter», ça m’a plu. Ça m’a tellement plu que j’ai englouti les épisodes, les uns après les autres, du fond de mon lit. J’ai oublié que j’avais faim, que j’avais des amis et que j’avais une famille. Le lendemain, le temps n’était plus aux séries TV mais ça ne m’a pas arrêtée. Quand j’avais besoin de faire pipi, je promettais à ma vessie d’y aller à la fin de l’épisode. Mais le moment venu le suspense était tel que je la trahissais lâchement. Deux heures et demie plus tard, elle me rappelait mon infidélité à coups de crampes violentes et je finissais par prendre le chemin des toilettes.
»Le troisième jour, je me suis rendu compte que je vivais au lit, entre ma bouffe - que j’avais finalement décidé d’amener à moi après avoir perdu 2 kg - et mon ordinateur. Ça m’a culpabilisée cinq secondes mais il se passait un truc fou dans la série, alors j’ai oublié. L’après-midi, j’ai reçu un SMS d’une copine pour sortir boire un verre: «Déjà quelque chose de prévu ce soir, désolée.» Comprendre: «J’ai une vie sociale très active.» Mais la réalité était tout autre: lorsque je quittais mon tueur en série préféré, j’étais prise du même genre de tremblements qu’un alcoolique un lendemain de noce. Et on connaît la chanson: soigner le mal par le mal. C’est ce que j’ai fait, jusqu’à ce que je n’aie plus un seul épisode de «Dexter» à me mettre sous la dent (après environ quatre jours).
»Le sevrage n’a pas été trop difficile, car je devais retourner sur les bancs de l’uni. Mais depuis, le syndrome refait régulièrement surface les jours de congé. Comme moi, vous êtes nombreux à être des binge-watchers. C’est vachement tendance mais ça rend un peu cinglé. Alors un conseil: si vous n’avez pas commencé «Game of Thrones», renoncez.»