La Liberté

Manifester contre l’abattage animal

Courtepin » Les images chocs d’animaux encore vivants et maltraités dans des abattoirs en France n’en finissent pas de susciter colère et indignation. Et ce jusqu’à Fribourg. Une action contre la mise à mort d’animaux aura lieu la nuit prochaine devant l’abattoir Micarna de Courtepin

Des activistes de l’association PEA camperont devant l’abattoir Micarna dans le cadre d’une mobilisation initiée en France. © Charly Rappo - archives
Des activistes de l’association PEA camperont devant l’abattoir Micarna dans le cadre d’une mobilisation initiée en France. © Charly Rappo - archives

Martin Bernard

Publié le 30.06.2016

Temps de lecture estimé : 5 minutes

A la suite de nouvelles révélations de l’association française L214 (lire ci-après), une action pacifiste se tiendra devant l’abattoir Micarna de Courtepin, dans le courant de la nuit prochaine, de 18 à 5h (heure d’ouverture de l’abattoir). La manifestation est organisée par l’association genevoise Pour l’égalité animale (PEA), qui milite en Suisse romande pour la protection du bien-être et de la dignité animale.

«Cette action vise à sensibiliser le public sur le sort que notre société réserve aux animaux», indique Malena Azzam, porte-parole de PEA. «Il est essentiel de rendre visibles les abattoirs afin de faire comprendre que manger des animaux ne va pas de soi. Nous voulons aussi montrer qu’il ne suffit pas d’améliorer les conditions d’abattage, car nous ne pouvons pas tuer décemment. Il faut donc surtout arrêter de mettre à mort des animaux.»

Mouvement dans trois pays

La manifestation de Courtepin s’incrit dans le cadre d’une mobilisation plus large initiée sur Facebook par l’association antispéciste française 269 Life libération animale. Cette nuit, l’événement devrait mobiliser simultanément plus de 400 activistes répartis dans trente-trois lieux d’abattage en France, en Belgique et en Suisse. Il devrait se dérouler sous la forme d’une «Nuit debout» et de manière pacifique. «La manifestation sera statique et silencieuse, dans une attitude de deuil», confirme Malena Azzam. «Nous avons choisi cet abattoir car il est l’un des plus gros de la région, et qu’il appartient au groupe Migros», précise la porte-parole.

L’entreprise Micarna est en effet leader dans le domaine de la transformation de viande en Suisse. L’an dernier, son chiffre d’affaires était d’environ 1,5 milliard de francs. A Courtepin, où le groupe a été fondé en 1958, sont abattus chaque année 28 millions de poulets (la totalité de la production annuelle de Micarna), et 350'000 porcs.

«Nous nous insurgeons contre les critiques de l’association PEA», souligne Micarna dans un communiqué. «Le groupe s’engage depuis des années en faveur de normes élevées en matière de bien-être animal. Il transforme uniquement des animaux qui ont été étourdis et abattus de manière professionnelle, sous la surveillance de collaborateurs de l’Office vétérinaire cantonal.»

Vingt personnes maximum

Il n’a pas été aisé pour les activistes de PEA d’obtenir l’autorisation d’organiser leur manifestation. Leur demande a d’abord été rejetée par le Conseil communal de Courtepin, avant de passer la rampe auprès de la préfecture. Au final, l’action a donc reçu l’aval des autorités, «mais à condition que seules vingt personnes au maximum soient présentes», informe Malena Azzam. L’association ajoute qu’elle devra peut-être par conséquent refuser l’accès à certains.

«Nous nous sommes positionnés ainsi surtout pour des raisons de sécurité et en pensant aux possibles nuisances sonores en pleine nuit. La route communale passe devant l’entreprise et les trottoirs ne sont pas larges», explique Jean-Claude Hayoz, syndic de Courtepin, mais aussi chef de la maintenance des volailles à Micarna. «Nous avons de bonnes relations avec le groupe. Nous voulions éviter tout risque que la manifestation dérape, et que la route soit bloquée au petit matin, l’heure ou les camions arrivent.»

Par la voix de sa porte-parole, l’association PEA a cependant rassuré s ur ce point. «Nous ne voulons pas bloquer les camions. Nous ferons simplement des discours et allumerons des bougies en mémoire des victimes.»

 

Les normes d’abattage sont plus sévères en Suisse que dans l’hexagone

Les manifestations qui se dérouleront ce soir en France, en Belgique et en Suisse sont la conséquence de plusieurs enquêtes menées sur les huit derniers mois par l’association française L214 sur les conditions d’abattage dans l’Hexagone.

Les dernières révélations datent d’hier. Des images tournées entre novembre 2015 et mai 2016 dans des abattoirs de Pézenas (Hérault) et du Mercantour (Alpes-Maritimes) font état de dispositifs d’étourdissement défaillants, de maltraitance répétée des animaux et de violations de la réglementation. Ces cas, loin d’être isolés, semblent souligner l’existence d’un problème systémique dans les abattoirs français. Une Commission d’enquête parlementaire a été constituée en avril dernier pour étudier la question. Problème: selon L214, certains de ses membres se seraient rendus le 17 mai dernier sur le site de Pézenas, sans relever de dysfonctionnement particulier.

Qu’en est-il en Suisse dans ce domaine? Le pays est doté de règles bien plus strictes et détaillées que ses voisins européens. C’est ce qu’a souligné Le Matin Dimanche dans une enquête publiée début avril. Une ordonnance fédérale sur la protection des animaux règle ainsi les points à respecter pour la mise à mort. La Protection suisse des animaux effectue aussi des contrôles réguliers. Selon Le Matin Dimanche, ils sont cependant annoncés à l’avance, ce qui ne permet pas à l’association de connaître au jour le jour la situation dans les abattoirs. Pour l’heure, en tout cas, aucun exemple de maltraitance ressemblant à ceux révélés en France n’a été découvert en Suisse.

Reste que si les Helvètes sont plus sensibles au traitement des animaux, la consommation de viande annuelle augmente régulièrement. Hors volailles, le nombre d’animaux abattus est ainsi passé de 3,58 millions en 2013, à 3,64 en 2014, soit 70 000 bêtes tuées en plus. 

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