La Liberté

Un pic de fréquentation aux urgences

Les urgences de l’Hôpital fribourgeois observent en ce moment une hausse de l’activité d’environ 20%

Le service des urgences ne désemplit pas. © Charly Rappo - archives
Le service des urgences ne désemplit pas. © Charly Rappo - archives
Vincent Ribordy, médecin-chef à l'HFR.
Vincent Ribordy, médecin-chef à l'HFR.

Nicolas Maradan

Publié le 05.03.2019

Temps de lecture estimé : 8 minutes

Santé » Les urgences de l’Hôpital fribourgeois (HFR) sont actuellement prises d’assaut. «Depuis le début de l’année, nous observons sur l’ensemble des sites environ 20% d’activité en plus par rapport à l’année dernière durant la même période. Et la hausse est plus marquée sur le site de Fribourg», observe Vincent Ribordy, médecin-chef. Une augmentation due à la conjonction de plusieurs facteurs. Premièrement, les mois d’hiver sont généralement synonymes d’intense activité pour les services d’urgences. «Certains associent la période propice au ski à une augmentation des blessures. En réalité, c’est la neige et surtout la glace qui, de manière générale, font des ravages. Beaucoup de gens glissent sur le trottoir, devant chez eux ou sur un parking. Nous observons de nombreuses blessures durant les jours qui suivent d’importantes chutes de neige», souligne Vincent Ribordy.

 

Et cette année, les dégâts causés par le froid coïncident avec ceux de la grippe saisonnière. Habituellement, le seuil épidémique – c’est-à-dire 68 consultations hebdomadaires dues à la grippe pour 100 000 habitants – est dépassé à la fin du mois de décembre et le pic est atteint début janvier. Mais la cuvée 2019 a du retard: c’est durant la semaine du 4 février qu’elle a frappé le plus durement en Suisse avec, selon les chiffres communiqués par l’Office fédéral de la santé publique, une moyenne de 305 cas d’affection grippale pour 100 000 personnes. Sans parler de la menace supplémentaire que représente le norovirus, responsable de certains types de gastro-entérite.

Prévoir les fluctuations

Et, à cause de la relâche scolaire, la semaine de carnaval risque d’être tout aussi animée. «Logiquement, les vacances provoquent le départ d’une partie de la population. Pourtant, pour nous, cela ne se traduit pas par une baisse de la fréquentation. Les médecins installés jouent un rôle important dans la prise en charge des besoins urgents de la population, et il y a un report sur les urgences lorsque ceux-ci sont en vacances», indique le médecin-chef. Il ajoute: «L’activité hospitalière n’est jamais uniforme. Elle suit des fluctuations, logiquement liées à l’activité humaine. Mais il est très difficile de prévoir ces fluctuations.»

A tel point qu’il y a un mois, l’Hôpital intercantonal de la Broye (HIB), lui aussi submergé, indiquait avoir dû reporter certaines opérations déjà programmées (voir ci-dessous). Pour éviter d’en arriver là, l’Hôpital fribourgeois analyse les mouvements de patients. «Et nous nous y adaptons quasiment heure par heure», relève Johann Ripper, responsable de la gestion des flux au sein de l’HFR.

Au niveau trois

Dès que la capacité hospitalière maximale est atteinte, des mesures sont prises. Quatre niveaux existent. Le premier implique, avant un transfert de l’ambulatoire vers le domaine stationnaire, un petit temps d’attente dans des zones tampons, installées par exemple en salle de réveil ou aux soins intensifs, sans que cela n’altère la prise en charge. Quand le deuxième degré est atteint, des lits supplémentaires doivent être mis à disposition. «Si nous parlons d’un ou deux lits supplémentaires pendant une douzaine d’heures, la charge peut être absorbée par le personnel déjà sur place. Au-delà, il faut trouver du personnel supplémentaire afin d’assurer la qualité et la sécurité de la prise en charge», prévient Johann Ripper. Il poursuit: «Dès le moment où nous devons engager du personnel intérimaire afin de pouvoir gérer l’afflux de patients, nous atteignons le troisième niveau.» Le quatrième et dernier échelon nécessite le report des opérations programmées ou le transfert de certains patients vers l’extérieur. Actuellement, l’HFR en est au troisième niveau. Un moindre mal. «Dans certains pays, le délai d’hospitalisation est devenu un indicateur souvent utilisé pour qualifier la qualité des prises en charge. En France, il arrive que des malades n’aient pas de lit pendant des périodes allant jusqu’à 72 heures», relève Vincent Ribordy. Heureusement, il n’existe pas encore de tel rationnement des soins dans le canton de Fribourg. «Mais nous nous rapprochons de notre capacité maximale», alerte-t-il. «En outre, l’HFR a connu en 2018 une augmentation de son activité. Cela explique aussi la situation actuelle», ajoute Johann Ripper.


La crise baisse d’un cran dans la Broye

L’Hôpital intercantonal de la Broye déborde depuis près d’un mois, mais la situation est en train de revenir à la normale.

Situé à Payerne et à Estavayer-le-Lac, l’Hôpital intercantonal de la Broye (HIB) a tiré la sonnette d’alarme il y a un mois. L’établissement, plein à ras bord, a dû reporter plus d’une vingtaine d’opérations, engager du personnel supplémentaire, «ouvrir» 23 nouveaux lits et a tenu des réunions de crise, tandis que les employés ont mis les bouchées doubles, ce qui a permis de maîtriser la situation. Selon le porte-parole Christian Aebi, un tel contexte ne s’était encore jamais vu sur une aussi longue durée.

Aujourd’hui, les choses se sont légèrement détendues. «Sur une échelle de crise de 1 à 4, nous venons de passer du niveau 4 au niveau 3», explique le chargé de communication, ajoutant qu’aucun report d’opération n’est prévu pour cette semaine. Le dispositif de lits supplémentaires est néanmoins maintenu en cas d’autre afflux massif de patients.

Des analyses vont avoir lieu afin de pouvoir anticiper de nouvelles surcharges de longue durée et renforcer le dispositif pour y faire face. Les conséquences financières ne sont pas encore chiffrées. S’il y a eu davantage de rentrées, il y a aussi eu des charges, précise Christian Aebi. Lise-Marie Piller


Quatre patients sur cinq entrent par les urgences

Au service des urgences, la gestion des flux de patients ne dépend pas seulement du nombre de blessés ou de malades qui arrivent. «Nous ne sommes qu’un des maillons d’une chaîne. Les urgences sont souvent dépendantes de ce qui se passe en aval», rappelle Vincent Ribordy, qui dirige les urgences de l’Hôpital fribourgeois (HFR). En effet, quatre patients sur cinq qui sont hospitalisés à l’HFR y entrent via le service des urgences. C’est beaucoup, sachant que la moyenne suisse s’établit à environ 55%. Et cela signifie que, pour qu’un malade ou un blessé puisse quitter les urgences, il est parfois nécessaire d’attendre qu’une place se libère en soins aigus ou en réadaptation. Difficulté supplémentaire: certains patients disposent d’une assurance complémentaire leur offrant une place en division privée ou semi-privée. Mais en cas de surcharge, ces malades devront peut-être se rabattre sur la division commune. «Les contrats d’assurance-maladie stipulent d’ailleurs qu’un placement en chambre privée ou semi-privée ne peut être garanti que dans la limite des places disponibles», précise Johann Ripper, responsable de la gestion des flux au sein de l’HFR. Il ajoute: «D’autant qu’en période de grippe, les chambres individuelles sont parfois utilisées pour les patients qui doivent être isolés pour des questions médicales.» NM


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