La Liberté

Des pistes pour intéresser les jeunes

Des initiatives sont prévues, notamment dans les boîtes de nuit, pour contrer l’abstentionnisme

Sylvie Dervey, ats

Publié le 23.04.2019

Temps de lecture estimé : 4 minutes

Politique » «Nous, les jeunes, votons sur des choses qui nous affectent. Mais pendant les campagnes, l’impact des scrutins ne nous paraît pas évident. Lors de votations sur les retraites par exemple, personne ne nous dit clairement: «Attention à telle ou telle conséquence», explique Sandro, 23 ans.

Le jeune homme avoue ne voter que lors de scrutins importants pour lui. Le dernier en date: le deuxième tube du tunnel routier du Gothard (en 2016). A l’instar de Sandro, de nombreux jeunes ont de la peine à voir l’impact de la politique sur leur vie quotidienne. Selon le monitorage politique 2018 d’easyvote, diffusé récemment, moins de la moitié des jeunes de 15 à 25 ans interrogés estiment que le parlement prend des décisions importantes pour leur quotidien.

La même étude a montré que les jeunes s’intéressent de moins en moins aux questions politiques et à l’actualité. Moins d’un quart (23%) s’informe quotidiennement. «Lors des votations, je ne vais pas forcément chercher des informations par moi-même», reconnaît Sandro.

Cette tendance est préoccupante, estime René Knüsel, politologue à l’Université de Lausanne: «Avec la baisse du niveau d’information, c’est le ressort de toute démocratie qui est menacé.»

Lancement de Votenow

Fournir aux jeunes des informations neutres et compréhensibles sur les votations et des élections, tel est l’un des objectifs d’easyvote, un projet de la Fédération des parlements de jeunes lancé il y a une dizaine d’années. Brochures et vidéos explicatives, interventions dans les classes constituent quelques-uns de leurs outils.

Easyvote vient en outre de lancer l’application Votenow. Disponible dans les trois langues nationales, elle vise à aider les jeunes à se prononcer sur les objets de votation. Pour ce faire, ils doivent répondre à une vingtaine de questions, avec la possibilité de donner plus de poids à certaines réponses.

Pour les élections fédérales d’octobre, easyvote va s’associer à smartvote, indique sa responsable Zoë Maire. Smartvote est une plateforme en ligne qui permet, à l’aide d’un questionnaire, de voir quel politicien est le plus proche de ses intérêts.

De leur côté, et pour la troisième fois, les délégués romands à l’enfance et à la jeunesse vont lancer une campagne commune environ un mois avant les élections. Intitulée «J’ai voté», elle se déroulera notamment dans une cinquantaine de boîtes de nuit, où le tampon d’entrée sera remplacé pour l’occasion par un tampon «J’ai voté».

«Il s’agit surtout de déclencher des discussions, de faire réagir les jeunes et de les faire parler du sujet», explique Tanguy Ausloos, délégué à la jeunesse de la ville de Lausanne.

René Knüsel estime que ce genre d’initiatives sont importantes et utiles. Elles ne mobilisent toutefois qu’une frange déjà intéressée et interviennent trop tard, estime-t-il.

Selon le politologue lausannois, pour motiver les jeunes à voter, il faut leur montrer comment ils peuvent influencer leur environnement. Cela passe par de petites initiatives tout au long de la scolarité, qui incluent des expérimentations pratiques.

Maire à 19 ans

La question de la participation politique des jeunes renvoie au défi plus large de leur intégration dans la société, explique M. Knüsel. Et de pointer du doigt l’entrée plus tardive et difficile sur le marché du travail. «Il existe une corrélation entre vie professionnelle et participation politique. Les gens votent plus entre 35 et 60 ans, lorsqu’ils se sentent pleinement intégrés dans la vie sociale et politique», ajoute-t-il.

Des changements sont aussi nécessaires dans la manière dont les jeunes sont perçus. «On ne leur donne pas la crédibilité d’un citoyen ordinaire. Personne par exemple ne se dit qu’il va voter pour un maire de 19 ans», illustre M. Knüsel.


Le climat aura-t-il un effet mobilisateur?

Plus de 50 000 jeunes ont défilé dans les rues suisses pour la première grève du climat le 15 mars dernier. L’ampleur de la mobilisation contraste avec le très faible taux de participation des 18-24 ans (30%) lors des dernières élections fédérales. Cette apparente contradiction n’en est toutefois pas totalement une pour René Knüsel, politologue à l’Université de Lausanne. «Les jeunes s’engagent pour défendre des causes mais pas forcément sur la durée. De plus, il n’est pas sûr que les manifestants perçoivent leur action comme un geste politique», explique-t-il. M. Knüsel n’exclut pas que ces manifestations incitent certains jeunes à s’engager politiquement, à l’instar de la guerre du Vietnam en son temps. Il rappelle toutefois que la plupart des manifestants sont des gymnasiens qui ne disposent pas encore du droit de vote. ATS

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