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L’abandon du mazout, c’est jouable

Une sortie complète de la chaleur d’origine fossile est possible d’ici à 2050 en Suisse, selon une étude

Le vieux chauffage à mazout de l’Hôpital intercantonal de la Broye, à Payerne, devrait bientôt céder la place à un système innovant où la chaleur sera puisée directement dans l’eau du lac de Neuchâtel. © Charly Rappo
Le vieux chauffage à mazout de l’Hôpital intercantonal de la Broye, à Payerne, devrait bientôt céder la place à un système innovant où la chaleur sera puisée directement dans l’eau du lac de Neuchâtel. © Charly Rappo
Publié le 08.06.2020

Temps de lecture estimé : 4 minutes

Chauffage » Une sortie complète de la chaleur d’origine fossile est possible et finançable d’ici à 2050, selon une étude de l’alliance économique Initiative Chaleur Suisse. Les conditions cadres doivent toutefois être définies en conséquence. En Suisse, 50% de la consommation finale d’énergie est due à la production de chaleur et 70% de cette énergie est issue de ressources fossiles, non renouvelables, a rappelé hier dans un communiqué AEE suisse, l’organisation faîtière de l’économie des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique, qui chapeaute l’Initiative Chaleur Suisse, regroupant plusieurs associations et entreprises du secteur.

La conversion intégrale à un approvisionnement en chaleur renouvelable et neutre en CO2 est possible en Suisse, que les conditions cadres politiques misent sur l’incitation ou sur la réglementation, relèvent les auteurs de l’étude, menée par les sociétés de conseil TEP Energy Solutions et Ecoplan.

Une transition finançable

Les deux scénarios requièrent un mix technologique et énergétique similaire. Dans la plupart des domaines (ménages, industrie, commerces), le passage aux énergies renouvelables est réalisable de manière économiquement rentable.

La décarbonation du marché du chauffage entraînera des coûts directs et indirects nets d’environ 1,5 milliard de francs par an durant la phase de transition, de 2020 à 2050, relèvent les auteurs de l’étude. Par rapport aux quelque 13 milliards de francs que la Suisse paie chaque année pour l’importation de combustibles fossiles, «cet investissement est judicieux et crée une valeur ajoutée en Suisse», selon le communiqué. Pour l’économie dans son ensemble, la décarbonation se traduira par une hausse de la création de valeur. Le nombre de salariés pourrait augmenter de plus de 4000 équivalents temps plein.

Rénover les bâtiments

La Suisse consomme à l’heure actuelle environ 100 térawatts-heure (TWh) d’énergie pour le chauffage. Les auteurs de l’étude ont calculé que ce chiffre pouvait être réduit à 80-90 TWh grâce à des mesures d’efficacité énergétique, telles que la rénovation des bâtiments, leur remplacement et les nouvelles constructions, mais aussi via la réglementation en matière d’isolation.

Selon les analyses, la Suisse dispose d’un potentiel d’énergie thermique renouvelable d’au moins 100 TWh. Dans les ménages, le chauffage peut être en grande partie assuré par des pompes à chaleur électriques. Pour les bâtiments de service, les besoins pourraient être majoritairement couverts avec des systèmes de chauffage à distance ou de proximité, de récupération de la chaleur ambiante ou grâce au bois.

Dans l’industrie, en revanche, la chaleur serait issue d’installations de chauffage à distance ou de proximité, ainsi que du passage au biogaz et des applications à usage direct de l’électricité. L’augmentation de la demande en électricité pourrait être partiellement compensée par la suppression des chauffages et chauffe-eau électriques, ainsi que par les gains d’efficacité des installations, appareils et équipements des bâtiments.

Les besoins supplémentaires peuvent être couverts par le développement des installations photovoltaïques, l’utilisation de centrales de cogénération à base de biomasse, l’optimisation et l’extension des capacités de stockage, ainsi que l’importation d’énergie éolienne.

Sources multiples

En considérant les trois secteurs, l’intégralité des sources d’énergie renouvelables est nécessaire pour atteindre l’objectif de zéro émission nette d’ici 2050, relèvent les auteurs de l’étude. Aucune des différentes technologies disponibles ne prédomine clairement à l’heure actuelle, puisque aucune ne couvre plus de 20% des besoins de chaleur.

La nouvelle loi sur le CO2, qui sera au menu du Conseil national dès demain, va dans le bon sens pour réussir la transition thermique. A plus long terme, des mesures supplémentaires seront toutefois nécessaires, selon l’étude. Les auteurs recommandent notamment une hausse progressive de la taxe sur le CO2 jusqu’à atteindre 300 francs la tonne d’ici à 2030. Cette augmentation doit être associée à une interdiction prospective des systèmes de chauffage à combustibles fossiles.

Le soutien financier des mesures relatives à l’enveloppe et à la technique du bâtiment doit parallèlement être encore étendu. L’efficacité énergétique des bâtiments doit aussi continuer à être améliorée. atS

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