Tout le monde a déjà entendu parler de la guerre d’Algérie. Mais qui savait que, alors que ce pays n’avait pas encore obtenu son indépendance, une équipe de footballeurs professionnels se battait à sa manière pour faire reconnaître le pays sur la scène internationale ? Que vous soyez amateurs de sport ou d’histoire, vous ne serez pas déçus par «Un maillot pour l’Algérie»,  BD bien fournie de 118 pages. Elle retrace l’histoire de ces sportifs clandestins et tout particulièrement celle de Rachid Mekhloufi  qui a collaboré avec les scénaristes Bertrand Galic et Kris, auteur d’«Un homme est mort», ainsi qu’avec le dessinateur Javi Ray.

On dit que ces «militants en short» on fait gagner dix ans de paix à l’Algérie. En 1958, le FLN (Front National de Libération), estimant que les dégâts du côté algérien étaient minimisés, a décidé de porter son combat aussi sur un plan médiatique en recrutant les joueurs algériens renommés des meilleures équipes de France. Ces derniers  vont tout abandonner pour soutenir leur pays d’origine : ironie du sort pour l’Hexagone qui recrutait et formait ces futurs professionnels d’Afrique du Nord afin de compléter ses équipes. Là où le football se mêle à la politique, ces légendes du sport pourront compter sur leur solidarité, mais aussi et surtout sur un humour à toute épreuve pour imposer leurs valeurs et leurs idéaux dans des conditions difficiles, à travers leurs tournées en Afrique, en Asie et en Europe de l’Est.

Le lecteur appréciera la fidélité historique des événements, ainsi que les nombreux flashbacks et précisions sur le conflit. Très bien intégrés à la narration, ils ne manqueront pas d’apporter toutes les informations nécessaires à la compréhension du contexte. Malgré le côté un peu cliché de certaines répliques, la diversité des personnalités est extrêmement bien rendue. Non seulement avec les piques récurrentes que les coéquipiers se lancent entre eux mais aussi avec les accès de doute, de désespoir ou de mal du pays qui rappellent que les héros de la BD sont aussi des hommes. Les traits des visages étonnamment bien marqués et individualisés accentuent encore cette variété.

«Simplement un footballeur…»: On retrouve ces mots à plusieurs reprises au fil des pages. Pourtant la couleur verte du maillot de ces joueurs, représentative de l’Islam et de l’Algérie, rappelle l’espoir que peuvent apporter à tout un peuple la symbolique et l’euphorie de simples matchs amicaux. D’ailleurs,  Mekhloufi  ne sera pas habillé très différemment à son retour dans son équipe de St-Etienne. Comme pour signifier qu’une valeur n’a pas de camp…

> Javi Ray, Bertrand Galic et Kris, Un maillot pour l’Algérie, Ed. Dupuis, coll. Aire libre, 118p.