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Écrans

Le grand collisionneur d’ados

Blaise Harrison filme les errances adolescentes de jeunes confrontés à des phénomènes fantastiques

Comédien amateur, Thomas Daloz hante le long-métrage de sa présence sombre et mutique.

 Olivier Wyser

Olivier Wyser

4 septembre 2019 à 04:01

Les Particules » Dans le Pays de Gex, à la frontière franco-suisse, Pierre-André et ses potes traversent une adolescence normale, entre premiers émois amoureux, musique, fêtes et drogues douces. Sous leurs pieds, le LHC du CERN, le plus grand accélérateur de particules du monde… Un concentré de technologie qui reproduit l’énergie du big bang à 100 mètres de profondeur. Alors que l’hiver s’installe dans cette région à la banalité inquiétante des phénomènes étranges, d’abord imperceptibles, se produisent. Puis, c’est tout le monde qui semble basculer. Interview avec le réalisateur Blaise Harrison qui, pour son premier long-métrage de fiction, filme l’adolescence avec une justesse de ton peu commune et une grande maîtrise des codes du cinéma de genre.

Film d’adolescence, film fantastique, d’épouvante… Comment décririez-vous votre long-métrage?

Blaise Harrison: C’est un mélange de tout cela. Disons que c’est avant tout un teen movie, avec les références inhérentes au genre, dans lequel j’ai voulu insuffler du fantastique et fricoter un peu avec l’horreur aussi. J’ai essayé de me nourrir de tout ce que j’aime en tant que spectateur et d’exploser ces genres pour en faire quelque chose qui me ressemble.

Parlez-nous du Pays de Gex, la région dans laquelle vous avez grandi, et du grand collisionneur de hadrons du CERN?

Mon envie était de filmer l’adolescence précisément dans ce territoire-là. C’est une région qui m’inspire et que je connais très bien. C’est à la fois un endroit ordinaire, avec ses lotissements, ses champs, ses petits centres, et un lieu qui ne ressemble à aucun autre parce qu’il est habité de beaucoup d’internationaux qui travaillent à Genève. Et puis il y a le CERN et cet accélérateur de particules… A cent mètres sous terre des hommes reproduisent les conditions d’énergie du big bang pour que des physiciens tentent de comprendre les lois qui gouvernent l’univers! C’est un lieu hallucinant de technologie qui évoque forcément la science-fiction. Une source de fantasme, d’inquiétude et de questionnement inépuisable.

Comment avez-vous déniché vos acteurs? Ils sont tous épatants de réalisme.

Je me suis inspiré de mes souvenirs d’adolescence mais je voulais les confronter à la jeunesse d’aujourd’hui. Il était important que les acteurs viennent du coin et que le film soit nourri par de vraies personnalités. Pour le casting j’ai passé un an à chercher, notamment plusieurs semaines au lycée de Ferney-Voltaire. J’ai rencontré plus de 500 jeunes pour trouver ceux qui ressemblaient à mes personnages. Thomas Daloz, qui interprète le rôle principal, je l’ai entendu parler à un copain dans la cour et j’ai tout de suite été séduit par sa voix, sa maladresse, son visage. Il a un énorme talent d’acteur.

Votre film allie l’observation du documentaire à la maîtrise de la mise en scène, des effets spéciaux… Vous avez mis du temps à trouver l’équilibre?

C’est un des enjeux du film. Je voulais m’affranchir du scénario pour provoquer l’imprévu. En même temps j’avais envie de faire un film maîtrisé. Le dosage n’était pas facile à trouver entre la chronique adolescente et le glissement progressif vers l’étrangeté et le surnaturel. Les effets spéciaux ont été pensés avant même de tourner. Je savais ce que je voulais obtenir pour que le spectateur soit témoin de ces phénomènes au même titre que les personnages.

En regardant votre film on pense inévitablement à David Lynch ou Gus Van Sant, à des films tels que Donnie Darko ou It Follows… Ces références vous parlent ou vous préférez vous en détacher?

Ce sont des choses que j’aime et qui m’ont façonné. C’est assez jouissif de jouer avec ces codes et ces références. Mais je n’ai pas voulu faire un film de citation, Le spectateur peut reconnaître des choses mais il se retrouve tout de même dans un univers que j’ai voulu singulier.

Très présente, la musique transmet également beaucoup d’émotions…

Elle me permet d’amener d’autres niveaux de lecture. C’est la possibilité d’exprimer des choses que l’on ne peut pas filmer ou que l’on ne voit pas. La musique est la voix intérieure du personnage. Elle donne des clés pour comprendre son état. Le son nous dit «lâchez prise!»

Un film de Blaise Harrison.

Avec Thomas Daloz, Nea Lueders, Salvatore Ferro.

Durée: 1 h 38.

Age: 12/14 ans.

En salle à Fribourg.

Notre avis: 4/5

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