«Ah les jeunes d’aujourd’hui, de mon temps…» Cette exclamation est tombée en désuétude l’autre jour dans le bus. J’y ai observé un vieux monsieur, d’une tranche d’âge que je respecte depuis toujours et encore plus depuis que je m’y avance avec certitude. Vers midi à la place de la Gare, il haranguait très fort le chauffeur parce qu’il avait dû faire trois pas pour monter dans le bus.

Plutôt que d’user de mots posés fermement imposant le respect, il a préféré pousser, avec ses mains et de toute sa hargne, des enfants qui s’engageaient dans le bus sans céder la priorité aux personnes qui en sortaient, et de plus vulnérables. Je suis désolée de n’avoir pas eu la présence d’esprit de lui rappeler qu’il a été, certes il y a très longtemps, un écolier affamé, distrait, circulant en bande et tout simplement jeune.

Monsieur, il y a peut-être eu ce midi-là des enfants qui ont relaté à leurs parents cet épisode tellement dommageable pour le vivre-ensemble générationnel. Apparemment, la frustration contre laquelle la société lutte vis-à-vis des jeunes ne vous a pas quittée, mais la vieillesse n’autorise pas de l’attiser, et c’est à cause d’un épisode aussi pathétique que l’on pourrait entendre désormais: «Ah les vieux d’aujourd’hui…»