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Santé mentale. Un meilleur suivi psychologique des migrants est nécessaire, selon des médecins

La récente prise d’otages par un requérant d’asile dans un train près d’Yverdon a mis en lumière la question sensible de l’état psychique des personnes concernées par l’asile.

Les requérants d’asile ont accès aux soins de base, mais il n’est pas toujours possible de leur garantir un suivi psychologique adapté. © Keystone/photo prétexte

Sevan Pearson

Sevan Pearson

18 février 2024 à 14:25

Temps de lecture : 1 min

La récente prise d’otages par un requérant dans un train près d’Yverdon a mis en lumière une question sensible: la santé mentale des personnes concernées par l’asile. Si rien ne peut ni justifier ni excuser un tel acte, il n’est pas possible non plus d’ignorer les observations des médecins qui les côtoient dans leur pratique quotidienne.

1 Quel état de santé mentale?

«Par définition, les personnes réfugiées viennent d’un pays en guerre, avec tous les traumatismes que cela implique», pose d’emblée Saskia von Overbeck Ottino, psychiatre FMH, ethnopsychanalyste et membre de l’association Médecins action santé migrants. «Entre 60 et 80% d’entre elles présentent des troubles psychologiques, comme la dépression ou un stress post-traumatique.» Sans compter les autres maladies psychiques (par exemple la schizophrénie) qui touchent environ 1% de la population mondiale.

Felicia Dutray, psychiatre-psychothérapeute et médecin responsable de la consultation psychothérapeutique pour migrants de l’association Appartenances Vaud, le confirme. Les traumatismes sont souvent la cause majeure du mal-être de ses patients, à la suite de la violence sous diverses formes vécue dans le pays d’origine (tortures, agressions, menaces, etc.) ainsi que de celle subie lors de la migration (travail forcé, esclavage, viols, entre autres).

Mais la procédure d’asile elle-même peut fragiliser des personnes déjà vulnérables. «Après avoir vécu tout cela, elles aboutissent dans des centres fédéraux bondés où les conditions de vie ne sont pas évidentes, même si leurs besoins primaires sont assurés. Comme elles sont confrontées au risque d’être renvoyées, il leur est difficile de se sentir rassurées. Et à ce moment-là de leur procédure de demande d’asile, elles ne bénéficient pas d’un suivi psychologique», résume Felicia Dutray.

2 Pourquoi des passages à l’acte?

Pour un bon suivi psychologique, il faut une certaine stabilité avec un réseau de soins autour du patient, surtout pour les troubles psychiques graves, comme ceux qui ont probablement conduit à la prise d’otages ou au suicide de deux requérants en 2023. «Or le parcours de l’asile est tout sauf stable», regrette Saskia von Overbeck Ottino.

«Dans le cas du preneur d’otages près d’Yverdon, une probable psychose et des facteurs de risque accrus – liés au stress dû à la procédure d’asile – ont joué un rôle déterminant dans le passage à l’acte», pointe la médecin. «Malheureusement, les personnes souffrant de troubles psychiques graves peuvent avoir un comportement désagréable, voire agressif, ce qui peut nuire à une relation empathique et même retenir les professionnels d’apporter une aide appropriée, alors qu’il faudrait au contraire leur accorder davantage d’attention.»

3 Quelles aides existantes?

Originaire d’un pays d’Afrique, Lisala* est arrivé en Suisse en 2015. Journaliste, il a fui des persécutions, ayant subi des menaces de mort et une agression physique. Placé dans le canton de Vaud, il est orienté par son généraliste vers un centre d’aide psychothérapeutique à Lausanne.

«Mon médecin m’a rassuré en me disant que ces soins étaient pris en charge par l’assurance-maladie de base. Après quelques séances avec le psychologue, la confiance était établie et j’ai pu suivre une thérapie, ce qui m’a fait beaucoup de bien», témoigne le quinquagénaire.

«De manière générale, s’il y a des stratégies aidantes, elles sont souvent réduites au strict minimum, au détriment d’une qualité auquel tout réfugié aurait droit», juge cependant Saskia von Overbeck Ottino.

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