La Liberté

Stefan Küng, «K» à part

«Bienvenue au club!» • Devant le jeune prince thurgovien Stefan Küng, nous sommes déjà nombreux à nous frotter les yeux. Et à rêver un peu... 

Pascal Bertschy

Publié le 07.05.2015

Temps de lecture estimé : 4 minutes

Si, si, c’est le printemps! Un vent de fraîcheur souffle sur le cyclisme. Même que ce coup de vent a décoiffé le Tour de Romandie, l'autre vendredi, quand Stefan Küng a frappé comme une flèche en plein cœur de la cible.

Sous une flotte du diable, ce jour-là à Fribourg, on a vu un rayon de soleil fuser. Tant et si bien que devant ce coureur de 21 ans, aujourd'hui, nous sommes nombreux à nous frotter les yeux. 

Stefan Küng est un moderne. Il peut faire parler la poudre sur piste comme sur route. Avec ça, il possède des jambes, des nerfs d’acier, un cœur, un coup d'œil, un culot, un courage et un amour de la gagne qui font en général les champions. 

Une telle classe frise l'insolence 

Le bonhomme, lui, semble encore plus fort que le coureur. Une telle classe ne devrait pas être permise. Ce jeune prince thurgovien a pour titres de noblesse sa modestie, sa simplicité, sa finesse, sa sagesse, ses éclats de rire. Et pousse l'élégance jusqu'à s’exprimer parfaitement en français. 

Loin de se contenter de maîtriser le français, Stefan dit aussi de jolies choses. Comme celle-ci, sortie à propos de sa victoire d’étape: «Le plus beau moment, c’est quand tu sais: celle-là, elle est pour moi!» 

L’image aura parlé tout particulièrement aux hommes chanceux, ceux qui ont pu rencontrer la femme de leur vie et le diront aussi. Le plus beau moment est en effet celui-là, quand on se dit: «Celle-là, elle est pour moi!»

Dans la roue de Koblet et de Kübler 

J’ai beau savoir qu’il est imprudent de prédire l’avenir et vain de désigner les champions de demain, mais tant pis. Stefan Küng me fait rêver, espérer. Après Hugo Koblet et Ferdi Kübler, ces deux montagnes en principe inaccessibles, le cyclisme suisse tient peut-être son troisième «K». 

Quand on voit comment Küng a raflé ses quatre titres de champion d’Europe M23 en 2014, et comment il est devenu champion du monde de poursuite cette année, il est permis de voir grand.

D’ailleurs, c’est décidé, je me tiendrai désormais dans la roue de ce garçon. Oui, oui, je vais suivre Stefan. A la télévision, parce qu'il n'y a que là où il sera facile à suivre, mais je ne le lâcherai plus. 

Me fais déjà une fête de le voir en action avec les BMC, samedi, dans le contre-la-montre par équipe du Giro. Et ne raterai pas la poursuite olympique de Rio, l’an prochain, si l’entraîneur national Daniel peut compter sur son fantastique quatuor Dillier-Küng-Pasche-Shir.

L'avis d'un expert et copain

Ai-je raison d'y croire ou suis-je en plein délire? Pour être fixé, j'ai posé la question à mon fou de vélo préféré. A savoir Georges Aeschlimann (n.d.l.r.: lire à son propos cette chronique «Sur la piste de Jo»), cet inlassable pédaleur de charme devenu septuagénaire, qui a fait du Velodrome Suisse de Granges sa résidence secondaire. 

Aeschlimann est bien placé pour parler de Küng, qu’il côtoie à Granges et avec qui il est copain. Alors Georges, d'après toi, est-ce qu’on tient notre futur grand? «Ce qui est sûr, c’est que Stefan a tout ce qu'il faut pour le devenir», m'a répondu tranquillement l’expert.

Ensuite, ça s'est vite gâté. Mon cher Georges a posé sa retenue dans un coin, s’est embrasé et a fait un éloge flamboyant du Stefan, phénomène selon lui plus que phénoménal. Et tu devrais voir l’intelligence du gars, son humilité, son esprit d’équipe, et ceci, et cela...

C’était dit avec une telle flamme, un enthousiasme si brûlant, que j'ai fini par m’inquiéter pour le Velodrome. Jo Aeschlimann s’allume si vite, quand on le lance sur Stefan Küng, qu’on ne devrait pas le laisser s’approcher de la piste. Sans faire exprès, il serait capable d’y foutre le feu!

M’enfin, voilà où nous en sommes: les débuts professionnels d’un coureur à part se déploient comme un vol d'hirondelles et, sans avoir eu besoin de gagner un Paris-Roubaix ou une étape dans un grand Tour, ce rouleur réussit déjà à nous faire tous dérailler. 

A mon avis, c’est bon signe...

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