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Suisse

Grengiols. une forêt de modules solaires prévue sur l’alpe

Le projet de Grengiols prévoit d’alimenter 200’000 ménages. Mais sans vouloir bétonner la montagne

Le parc solaire alpin projeté à Grengiols dans la vallée de Binn comprendrait 910 000 modules photovoltaïques.

 Maude Bonvin

Maude Bonvin

16 mars 2023 à 02:01

Energie, Nathalie Salamin » Le Valais compte bien tirer profit de l’offensive solaire du Parlement fédéral. Mercredi, les Forces motrices valaisannes (FMV) ont détaillé, devant la presse, leur projet d’installation à Grengiols dans la vallée de Binn. La production pourrait à terme couvrir la consommation d’électricité d’environ 200’000 ménages, grâce à 910’000 modules photovoltaïques. Le plus grand parc solaire alpin de Suisse raccordé au réseau possède, lui, 5’000 panneaux solaires. Propriété d’Axpo et d’IWB, il se trouve dans le canton de Glaris. A titre de comparaison, la Grande-Dixence produit pour 500’000 ménages.

A Grengiols, l’entreprise valaisanne en mains publiques n’a pas encore obtenu de permis de construire. La prochaine étape? Réaliser une étude d’impact environnemental. Un geste salué par Isabella Helmschrott, directrice de Cipra, l’association faîtière des ONG actives dans la protection des Alpes. La spécialiste espère toutefois que cette analyse sera suivie d’actes. Elle rappelle que l’installation de parcs solaires en altitude nécessite d’autres infrastructures comme des routes, des téléphériques, des centrales et des lignes électriques.

Dans le Haut-Valais, le parc photovoltaïque profitera du nouvel ouvrage d’accumulation des GKW. Il faudra également construire des centrales et lignes électriques supplémentaires. Un téléphérique temporaire sera aussi mis sur pied.

Les paysans dans le flou

Le directeur des FMV, Stéphane Maret, se défend de vouloir bétonner les Alpes: «Nous ne recouvrons pas cette région de panneaux. La surface alpine valaisanne atteint 5224 kilomètres carrés contre 12 kilomètres carrés de solaire. Nous sommes conscients de la résistance des ONG. Nous souhaitons d’ailleurs les intégrer à notre projet.» Et de préciser que les parcs alpins, comme la loi l’oblige, seront démantelés d’ici 30 à 40 ans, une fois la transition énergétique de la Suisse réalisée. Un argument qui laisse sceptique Isabella Helmschrott: «Nous ne savons pas dans quel état seront les terrains.» Elle s’interroge également: «Dans le parc naturel du Binntal, il y a des agriculteurs. Est-ce compatible avec le métier de paysan?» Les FMV le reconnaissent: «Les questions légitimes des exploitants d’alpage doivent être clarifiées.»

Milliards de francs

L’aménagement devrait être en partie fonctionnel dès la fin 2025, soit la date limite pour bénéficier des subventions voulues par les Chambres fédérales. Pour rappel, le coup de pouce de la Confédération peut atteindre jusqu’à 60% des investissements.

Le budget total de ce projet se chiffre en milliards de francs. Stéphane Maret ne fournit pas d’indications plus fines, tout en précisant que le coût ne représente pas un blocage. Les analyses se poursuivent pour évaluer les dépenses. Les FMV bénéficient du soutien de la commune de Grengiols et de quatre autres entreprises, dont Groupe E, actionnaire de La Liberté. «Il s’agit de travailler ensemble pour partager les opportunités et les risques», déclare le patron valaisan. La consommation d’électricité de la Suisse passera de 60 TWh actuellement à 84 TWh en 2050.

«C’est un projet hyper important car il a une composante hivernale», souligne pour sa part Alain Sapin, directeur du pôle électrique de Groupe E. Les installations alpines produisent en moyenne trois fois plus d’électricité en hiver que leurs consœurs des plaines. Or la Suisse importe essentiellement du courant durant cette période de l’année. «Nous faisons ce projet car nous avons besoin d’électricité en hiver», renchérit Stéphane Maret.

Pour Isabella Helmschrott, la solution repose sur les bâtiments existants en montagne au lieu de s’en prendre à une nature intacte. Elle fait notamment référence aux installations des pistes de ski qui peuvent accueillir des panneaux solaires sans atteinte à l’écosystème alpin. Stéphane Maret convient qu’il faut «pousser à fond partout le solaire».

Boom du solaire

Sur les alpages, les énergéticiens s’activent. «Nous assistons à un boom du solaire», observe Isabella Helmschrott. Le dossier haut-valaisan se trouve en concurrence avec plusieurs autres dans la course aux subventions. Axpo prévoit, par exemple, de produire de l’électricité à partir du solaire alpin pour environ 150 000 ménages d’ici à 2030. De son côté, BKW souhaite proposer une dizaine de projets encore cette année. Alpiq dispose notamment de quatre projets en Valais.

«Comme c’est de l’argent public, il faudrait que les meilleures solutions soient financées par la Confédération», estime Stéphane Maret. Tous espèrent des aides étatiques mais ne savent pas sur combien d’argent ils pourront compter exactement. Ils devraient y voir plus clair d’ici le mois d’avril.

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