Le président ukrainien a imposé jeudi des sanctions contre un homme d'affaires considéré comme son ami proche et accusé d’avoir orchestré une vaste affaire de corruption. Il tente ainsi de régler l’une des pires crises politiques qu’il traverse depuis l’invasion russe.

Ces sanctions visant Timour Minditch, 46 ans, ainsi qu’un autre homme d'affaires impliqué dans ce scandale, prévoient notamment le gel de leurs biens, selon un décret présidentiel. M. Minditch est accusé d’avoir orchestré un vaste système de corruption dans le secteur énergétique, avec 100 millions de dollars de pots-de-vin et impliquant plusieurs hauts responsables dont des ministres.
Cet homme, qui a quitté l’Ukraine peu avant le scandale, est copropriétaire de la société de production audiovisuelle fondée par M. Zelensky, qui était un humoriste vedette avant de se lancer en politique. Ce scandale éclate alors que le réseau énergétique ukrainien a été gravement endommagé par une série de frappes massives russes, qui ont provoqué des coupures de courant à l’approche de l’hiver.
Il s’agit de l’une des pires crises politiques pour le président Zelensky depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine en février 2022. Des voix s’inquiètent en Ukraine de la réaction d’alliés européens à ce scandale, alors que l’effort de guerre de Kiev dépend fortement de l’aide occidentale.
Le chancelier allemand Friedrich Merz, dont le pays est le principal bailleur européen de Kiev, a réclamé jeudi, lors d’un entretien téléphonique avec le président Zelensky, que ce dernier lutte «avec énergie» contre la corruption. M. Zelensky n’a pas, lui, mentionné le dossier de corruption en commentant son entretien avec M. Merz sur X. «J’ai assuré à Friedrich que l’Ukraine fera tout le nécessaire pour renforcer la confiance des partenaires», s’est-il borné à indiquer.
Interrogé par l’AFP, un haut responsable ukrainien travaillant étroitement avec le chef de l’Etat a assuré que le chef de l’Etat avait été pris au dépourvu par les révélations de l’enquête. «Bien sûr, il ne considère pas cela comme normal et a pété un câble lorsqu’il a découvert ce qui se passait», a assuré ce responsable. «Il soutient pleinement l’enquête. Tout le monde au gouvernement va aider l’enquête».
Cette source a assuré que «le président avait pris les mesures les plus dures possible dans le cadre de ses pouvoirs» en imposant des sanctions et réclamant le départ de deux ministres. «Le président n’a pas parlé avec Minditch» depuis l’éclatement de cette affaire, a encore affirmé le responsable. «Qu’y a-t-il à discuter? Qu’il aille voir ailleurs. Il a créé un tel problème», s’est-il insurgé.
Timour Minditch est également soupçonné d’avoir influencé des décisions de hauts responsables du gouvernement, parmi lesquels l’ex-ministre de la Défense, Roustem Oumerov, aujourd’hui secrétaire du Conseil de sécurité national, et un vice-Premier ministre, Oleksiï Tchernychov. Les ministres de l’Energie et de la Justice, Svitlana Gryntchouk et Guerman Galouchtchenko, ont annoncé mercredi leur démission, à la demande de M. Zelensky, après la révélation du scandale.
M. Galouchtchenko, ex-ministre de l’Energie, est accusé d’avoir perçu des «avantages personnels» dans cette affaire en échange du contrôle sur les flux financiers du secteur énergétique donné à M. Minditch. Mme Gryntchouk n’est, elle, pas directement visée par des accusations de corruption à ce stade mais elle est considérée comme une personne de confiance de M. Galouchtchenko, selon des médias ukrainiens.