Le radeau de la lecture

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Quelle délectation de lire Natacha (16 ans), dans la page Forum du 4 mars dernier, se regimber contre le tout-écran et prôner sans complexe les vertus de la lecture sur papier: évasion, apaisement, imaginaire effervescent, floraison de connaissances, foisonnement neuronal et pléthore d’autres bénéfices.

A la lecture de ces lignes juvéniles, les étoiles qu’elle dit avoir dans ses yeux ont directement filé dans les miens. Puissent sa conviction et son enthousiasme rayonner auprès de ses pairs et bien au-delà! Non pas qu’il faille diaboliser la technologie triomphante; elle a généré des outils géniaux qui font désormais partie intégrante de nos vies. Mais l’essentiel est de ne pas en devenir les veules otages. Nous possédons des smartphones et des ordinateurs, mais évitons que ceux-ci nous possèdent.

Comme souvent dans la vie, il s’agit surtout d’une question d’équilibre. Détourner de temps à autre ses doigts de ces cages chronophages de quelques pouces pour pouvoir encore tourner quelques pages avec son pouce. Offrir à nos yeux surexposés un peu de répit, une respiration visuelle; un baume de papier pour nourrir notre esprit, et tendre à le tranquilliser.

Il suffit parfois d’un rien, d’une étincelle – d’un livre coup de cœur ou d’un auteur qui nous séduit – pour que l’envie de lire s’embrase. Et il vaut la peine de (re)mettre sa main dans ce feu-là. Car non seulement il ne mutile pas, mais on n’a de cesse ensuite de souffler sur ses braises.

J’ai un rêve: que mes élèves, quelques minutes par jour, s’y brûlent doucement leurs ailes pixélisées.

Marc Aebischer, enseignant,  écharlens