Liszt, pianiste de la démesure
Hier soir au Gstaad Menuhin Festival, le pianiste Dejan Lazic réécrivait en lettres d’or le slogan «Pomp in Music» qui sert de fil rouge à la programmation de cet été. La vie et l’œuvre de Franz Liszt étaient au cœur des deux heures de récital offertes en l’église de Lauenen.
Benjamin Ilschner
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Interprète aguerri de ce répertoire redoutable, Dejan Lazic s’est glissé dans la peau du plus extravagant des pianistes romantiques pour révéler sa fulgurante force d’expression. Une Rhapsodie hongroise, deux Csardas, des pages tirées des Années de pèlerinage: le concert démarre au quart de tour, le concertiste en a les cheveux au vent. Il faut peu de retenue dans ces œuvres-là, et beaucoup de sang froid pour ne pas se laisser déborder par les sonorités dantesques qui émanent du piano. Vaillant, Dejan Lazic garde le contrôle sur l’action, raconte les partitions avec un naturel déconcertant et une implication totale.
Mais il raconte aussi une autre facette du créateur qu’était Liszt. Fou de piano, ce dernier transcrivait les œuvres lyriques et orchestrales qu’il admirait le plus pour pouvoir les jouer seul, et aussi pour les faire connaître au plus vite aux publics des quatre coins d’Europe. Le Roi des aulnes de Schubert, Tristan et Isolde de Wagner, le Requiem de Mozart… Des tours de force réalisés avec maestria, même s’ils ne sauraient égaler la «vraie» beauté des versions originales. Dejan Lazic en aura retiré le meilleur, aimantant ses auditeurs mesure par mesure dans ce répertoire de la démesure.