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Le National entame l'examen de l'initiative sur les juges étrangers

L'initiative pour l'autodétermination de l'UDC veut donner la primauté au droit suisse sur le droit international (archives). © KEYSTONE/PETER SCHNEIDER
L'initiative pour l'autodétermination de l'UDC veut donner la primauté au droit suisse sur le droit international (archives). © KEYSTONE/PETER SCHNEIDER


Publié le 30.05.2018


Faire primer le droit suisse sur le droit international, c'est ce que veut l'initiative UDC sur les juges étrangers. Le National a entamé mercredi l'examen du texte que rejettent tous les autres partis. Le PDC Gerhard Pfister a inopinément retiré son contre-projet.

Après deux heures de débat, le Conseil national n'a encore pris aucune décision sur le texte, même si son rejet semble scellé. La discussion reprendra mercredi prochain et elle s'annonce longue: plus de 80 orateurs sont annoncés.

L'initiative populaire "Le droit suisse au lieu de juges étrangers" ou pour l'autodétermination vise à consacrer la primauté du droit constitutionnel suisse sur le droit international, sous réserve des règles impératives du droit international (interdiction de la torture, du génocide et de l'esclavage, notamment).

Elle impose aux autorités d'adapter les traités internationaux contraires à la Constitution et, au besoin, de les dénoncer. Le Tribunal fédéral ne serait plus obligé d'appliquer les traités internationaux qui n'ont pas été sujets au référendum.

Au Conseil des Etats, le texte a été balayé par 36 voix contre 6. La commission du National propose elle aussi le non. Elle a également estimé qu'il n'était pas nécessaire de proposer une alternative au peuple.

Pas de contre-projet

Dans ce contexte, Gerhard Pfister (PDC/ZG) a retiré sa proposition de contre-projet, vouée à l'échec, selon ses calculs. Convenant que la situation actuelle est problématique, il proposait d'introduire dans la Constitution une jurisprudence du Tribunal fédéral dite "Schubert", reprenant l'idée défendue sans succès par Andrea Caroni (PLR/AR) au Conseil des Etats.

A la différence de l'initiative qui veut systématiquement faire primer le droit constitutionnel sur le droit international, il s'agirait de décider au cas par cas et d'édicter dans le droit national des possibilités de déroger au droit international, pour autant que la protection des droits de l'homme soit garantie.

La compétence de dire ce qui prime irait au Parlement et au peuple plutôt qu’au Tribunal fédéral comme actuellement.

Contradictions

L'initiative populaire de l'UDC crée plus de problèmes qu'elle n'en résout, a expliqué Valérie Piller Carrard (PS/FR) au nom de la commission. La seule certitude est que dès qu'une contradiction apparaîtra entre une disposition constitutionnelle et un traité international, la Suisse sera obligée de renégocier le contrat, voire de le dénoncer.

Les craintes sont grandes que l'insécurité juridique qui en naîtrait nuise à l'économie de tout le pays. L'initiative pourrait aussi aboutir à la suppression d'importants traités relatifs aux droits de l'homme tels que la Convention européenne des droits de l'homme, a ajouté Kurt Fluri (PLR/SO).

Se succédant à la tribune, les représentants de tous les groupes parlementaires ont considéré que le texte est une mauvaise réponse et qu'il est inapplicable, mettant en question des fondements du droit suisse.

"Le sabotage du droit international que propose l'UDC est contraire aux traités qui ont construit la Suisse moderne", a affirmé Roger Nordmann (PS/VD). L'initiative sabote ce qui fait la force de la Suisse, elle-même née d'un traité international entre trois Etats, a-t-il ajouté en citant l'exemple du Pacte du Grütli.

Renforcer la démocratie

Pour les initiants, le texte est tourné vers l'avenir. Il offre une plus grande sécurité du droit suisse et vise à renforcer la démocratie, a expliqué Gregor Rutz (UDC/ZH).

La primauté du droit international et l'accord institutionnel avec l'Union européenne sont un cocktail explosif, a ajouté son collègue Hans Ueli Vogt. "L'UE va pouvoir amender notre constitution alors que la démocratie directe fait la force de notre pays."

Face aux autres partis, l'UDC a adopté une stratégie visant à occuper le terrain, posant systématiquement des questions à tous les intervenants. Seul le camp bourgeois a accepté de répondre, la gauche renvoyant les questionneurs au débat qui risque de se prolonger, vu la liste des orateurs inscrits.

ats

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