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Weinstein avait une liste des femmes susceptibles de le dénoncer

Lors du témoignage de l'actrice Annabella Sciorra, qui accuse M. Weinstein de l'avoir violée en 1993, la défense a essayé de saper sa crédibilité en montrant qu'elle n'en avait pas parlé pendant des années, © KEYSTONE/AP/KW
Lors du témoignage de l'actrice Annabella Sciorra, qui accuse M. Weinstein de l'avoir violée en 1993, la défense a essayé de saper sa crédibilité en montrant qu'elle n'en avait pas parlé pendant des années, © KEYSTONE/AP/KW
Lors du témoignage de l'actrice Annabella Sciorra, qui accuse M. Weinstein de l'avoir violée en 1993, la défense a essayé de saper sa crédibilité en montrant qu'elle n'en avait pas parlé pendant des années, © KEYSTONE/AP/KW
Lors du témoignage de l'actrice Annabella Sciorra, qui accuse M. Weinstein de l'avoir violée en 1993, la défense a essayé de saper sa crédibilité en montrant qu'elle n'en avait pas parlé pendant des années, © KEYSTONE/AP/KW


Publié le 25.01.2020


Harvey Weinstein voulait recueillir des informations sur les femmes susceptibles de le dénoncer, a raconté vendredi un enquêteur privé. Il s'exprimait au troisième jour du procès du producteur de cinéma à New York.

Lors de son audition, le détective privé Sam Anson a expliqué avoir reçu un courrier électronique d'Harvey Weinstein mi-août 2017. Soit un peu moins de deux mois avant la publication des révélations du New York Times et du New Yorker.

Le message contenait une "liste rouge" de personnes sur lesquelles l'ancien patron du studio Miramax demandait au privé d'enquêter. Il l'a également appelé pour préciser sa requête.

"Il disait qu'il s'inquiétait de la préparation d'articles évoquant son comportement sexuel de manière négative", a témoigné Sam Anson, qui a assuré ne pas avoir donné suite à cette demande.

Dans cette liste figuraient notamment, selon l'enquêteur, les noms des actrices Annabella Sciorra et Rose McGowan, qui affirment chacune avoir été violées par Harvey Weinstein.

"Il me détruira"

Annabella Sciorra a raconté jeudi avoir été violée par M. Weinstein à l'hiver 1993. Elle a également détaillé le harcèlement auquel il l'aurait soumise pendant des années.

Bien qu'elle n'ait pas parlé publiquement de ce viol jusqu'en octobre 2017, Mme Sciorra avait témoigné jeudi en avoir parlé à une amie, l'actrice Rosie Perez ("Do The Right Thing", "Etat second").

Vendredi, cette dernière a comparu comme témoin et a bien indiqué avoir parlé à Annabella Sciorra, la nuit de son agression présumée. A la demande de la procureure, Mme Perez a montré du doigt M. Weinstein, assis avec ses avocats. L'ex-magnat d'Hollywood lui a fait signe de la main.

"Annabella m'a dit 'Je crois que quelque chose de grave est arrivé. Je crois que c'était un viol'", a déclaré l'actrice nommée aux Oscars pour "Etat second". Quelques mois après, selon Mme Perez, Annabella Sciorra lui a révélé qu'Harvey Weinstein était l'agresseur. "Je lui ai dit, 'S'il te plait, parle à la police'. Mais elle m'a dit, 'Je ne peux pas, il me détruira'".

Un avocat de la défense, Damon Cheronis, a cependant accusé Rosie Perez de se contredire: il a souligné qu'elle avait dit dans le passé, à un journaliste du New Yorker, que Mme Sciorra ne lui avait parlé du viol que longtemps après les faits.

Démonter des "mythes"

Vendredi matin, le tribunal avait entendu un autre témoin de l'accusation, la psychiatre Barbara Ziv, qui avait témoigné au procès de la star de la télé américaine Bill Cosby, condamné pour agression sexuelle.

La procureure de Manhattan, Joan Illuzzi-Orbon, l'avait citée pour démonter "certains mythes" sur les agressions sexuelles, au coeur du procès. L'experte a ainsi souligné que la plupart des agressions sexuelles sont commises par une connaissance de la victime et non par un inconnu.

Une autre idée fausse largement répandue, selon cette experte qui a témoigné à plus de 200 procès, est que les victimes signalent généralement leur agression à la police ou à des amis.

Multiples échanges

Harvey Weinstein, 67 ans, longtemps figure vénérée d'Hollywood, risque la perpétuité pour avoir possiblement agressé sexuellement deux femmes, une ex-assistante de production en 2006 et une jeune actrice en 2013.

Les avocats de la défense ont cité de multiples échanges entre M. Weinstein et la femme supposément violée en 2013, Jessica Mann, montrant selon eux qu'ils avaient eu "une relation amoureuse" après le viol présumé, insinuant qu'elle n'avait donc pas pu être violée.

Jeudi la défense avait essayé de saper la crédibilité d'Annabella Sciorra en montrant qu'elle avait tu son viol supposé pendant des années, et qu'elle avait continué à croiser M. Weinstein après cela, sans le confronter.

Rester en contact est la norme

"C'est la norme que de rester en contact", a souligné Mme Ziv. "Ces contacts peuvent aller de SMS ou courriels jusqu'à une relation qui continue". Les victimes restent souvent silencieuses, car elles peuvent avoir une sorte d'affection pour leur agresseur, selon l'experte. Et ce dernier a parfois la capacité de leur faire perdre amis et emploi.

Lors d'un contre-interrogatoire, l'avocat de la défense Damon Cheronis a demandé à Mme Ziv s'il était possible qu'avec les années, "par honte", des femmes qualifient de viol ce qui avait été un rapport sexuel consensuel. "Tout est possible, (mais) ce n'est pas habituel," a répondu Mme Ziv.

Au total, plus de 80 femmes, parmi lesquelles des vedettes comme Angelina Jolie, Gwyneth Paltrow ou Léa Seydoux, ont accusé M. Weinstein de harcèlement et d'agressions sexuelles depuis octobre 2017. Mais la plupart des faits sont anciens et prescrits.

ats, afp

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