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Le procès des assassins présumés de deux touristes est reporté

Le procès à Salé, près de Rabat, des assassins présumés de deux touristes scandinaves, décapitées dans le sud du Maroc, a été à nouveau ajourné jeudi. Il reprend le 30 mai. © KEYSTONE/AP/MOSA'AB ELSHAMY
Le procès à Salé, près de Rabat, des assassins présumés de deux touristes scandinaves, décapitées dans le sud du Maroc, a été à nouveau ajourné jeudi. Il reprend le 30 mai. © KEYSTONE/AP/MOSA'AB ELSHAMY


Publié le 16.05.2019


Le procès des assassins présumés de deux touristes scandinaves, décapitées dans le sud du Maroc, a été ajourné jeudi au terme d'une brève audience. La partie civile a demandé à ce que la "responsabilité morale" de l'Etat soit engagée en vue de dédommagements.

Le procès s'était ouvert le 2 mai, mais avait été reporté à ce jeudi. La troisième audience de ce procès lors duquel sont jugés à Salé, près de Rabat, plusieurs suspects - dont un Hispano-Suisse - ayant prêté allégeance au groupe Etat islamique (EI) a été fixée au 30 mai, selon un journaliste de l'AFP.

Dans le cadre de ce procès, 24 personnes sont jugées pour "apologie du terrorisme", "atteinte à la vie de personnes avec préméditation" ou "constitution de bande terroriste".

Les principaux suspects sont accusés d'avoir tué Louisa Vesterager Jespersen, une étudiante danoise de 24 ans, et son amie Maren Ueland, une Norvégienne de 28 ans, dans la nuit du 16 au 17 décembre, sur un site isolé du Haut-Atlas (sud) où elles campaient.

L'avocat des parents de Louisa qui se sont constitués partie civile, Me Khalid Elfataoui, a demandé à ce que la "responsabilité morale" de l'Etat soit engagée - "même si les autorités ont fait ce qu'il fallait après" -, en vue de dédommagements aux familles des victimes. Une requête acceptée par le tribunal.

Trio meurtrier

Les quatre principaux suspects ont "spontanément admis leur crime pendant l'enquête, et aujourd'hui ils regrettent ce qu'ils ont fait", a affirmé à l'AFP leur avocat commis d'office, Hafida Mekessaoui.

Me Khalid Elfataoui a indiqué pour sa part vouloir demander la peine de mort pour les assassins "même si les pays d'origine des victimes y sont par principe opposés".

Des condamnations à la peine capitale sont toujours prononcées au Maroc, mais un moratoire est appliqué de facto depuis 1993 et son abolition fait débat.

Les trois principaux suspects dans cette affaire, natifs de la région de Marrakech (sud), ont 25, 27 et 33 ans.

Le premier, chef présumé du groupe, était au premier rang des accusés jeudi, aux côtés de ses deux compagnons, le visage impassible. Surnommé "Abou Moussab", il avait déjà fait de la prison pour avoir tenté de rejoindre l'EI en Syrie.

Un quatrième Marocain, 33 ans, s'était rendu avec les trois autres dans la montagne mais était retourné à Marrakech pour y trouver une cachette, peu avant le moment du double crime, selon l'acte d'accusation consulté par l'AFP.

La diffusion sur les réseaux sociaux d'une vidéo montrant la décapitation d'une des victimes, filmée par un des hommes, avait suscité l'effroi dans le royaume.

Dans cette séquence, un des suspects parlait de "revanche" pour les "frères" en Syrie, où l'EI, sous le coup de plusieurs offensives, avait perdu la majorité des territoires dont il s'était emparé.

Une autre vidéo publiée dans la foulée montrait les quatre suspects principaux prêtant allégeance à l'EI.

Issus de milieux modestes, avec un niveau d'instruction "très bas" selon les enquêteurs, ils vivaient de petits boulots dans des quartiers déshérités de Marrakech, destination touristique phare du royaume.

Inspiré par l'EI

Leur "cellule terroriste" inspirée par l'idéologie jihadiste n'avait pas de "contact" avec des cadres opérationnels en Syrie ou en Irak, selon les enquêteurs. L'EI n'a jamais revendiqué leurs actes.

Selon l'acte d'accusation, le groupe s'était rendu dans les montagnes touristiques du Haut-Atlas le 12 décembre, décidé à "assassiner des touristes". Il avait repéré plusieurs cibles potentielles, mais renonçait à chaque fois en raison de la présence de guides ou d'habitants.

Dans la nuit du 16 décembre, le trio avaient repéré les deux victimes campant sur un site isolé.

Les 20 autres prévenus sont poursuivis pour leurs liens avec les tueurs présumés. Agés de 20 à 51 ans et membres présumés du groupe d'Ejjoud, ils sont accusés d'avoir "relayé des images de propagande", d'avoir planifié des attaques dans le royaume ou d'avoir voulu rejoindre l'EI en Syrie et en Irak.

Seul étranger du groupe, un Hispano-Suisse de 25 ans converti à l'islam et installé au Maroc. Un de ses avocats, Me Saad Sahli, a demandé jeudi au tribunal de "faire appel à un traducteur", afin que son client "puisse suivre les débats".

L'Hispano-Suisse est soupçonné d'avoir appris aux principaux suspects à utiliser une messagerie cryptée, de "les avoir entraînés au tir" et d'avoir participé à l'embrigadement de recrues, selon les enquêteurs. Devant le juge d'instruction, il avait déclaré être innocent.

Un autre ressortissant suisse interpellé dans la foulée du double assassinat a été jugé séparément et condamné à dix ans de prison à la mi-avril pour "constitution de bande terroriste" et pour ses liens avec un autre réseau de personnes radicalisées.

ats, afp

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