La Liberté

Remettre de l’affect dans le débat

Face à l’aseptisation de l’automobile avec la transition énergétique, la nostalgie du passé refait surface

Sur le prototype de la prochaine Renault 5, le traitement des lignes et des surfaces est résolument moderne. On reconnaît sans coup férir la très populaire R5 des années 1970/80. LD
Sur le prototype de la prochaine Renault 5, le traitement des lignes et des surfaces est résolument moderne. On reconnaît sans coup férir la très populaire R5 des années 1970/80. LD

Denis Robert

Publié le 03.03.2021

Temps de lecture estimé : 5 minutes

Clin d’œil » La transition énergétique et l’électrification des voitures nous dirigent inexorablement vers une mobilité sans grandes émotions. Les nouvelles mécaniques manquent de vie, de caractère et sont beaucoup moins génératrices d’émotions. Du coup la nostalgie d’un temps où l’automobile était aimée et faisait encore rêver refait surface.

Le 14 janvier dernier, le groupe Renault dévoilait son plan stratégique pour les années à venir, dans le cadre d’une vidéoconférence suivie dans le monde entier. Pour faire court, la course aux volumes cédera le pas à la création de valeur. L’entreprise ne mesurera plus ses performances au travers des ventes et des parts de marché, mais en fonction de la rentabilité, de la création de liquidités et de l’efficacité des investissements. Une culture en partie nouvelle pour l’ancienne régie, confrontée – comme ses concurrents – à une mutation en profondeur de l’industrie automobile. Une mutation due à la course à la digitalisation, mais aussi et surtout à cette transition énergétique qui mise sur l’électrification des véhicules pour tenter de remplacer progressivement les carburants et combustibles fossiles par des énergies renouvelables.

La vie en vert

Tous les nouveaux modèles futurs de Renault seront proposés en version électrique ou hybride. Sur les quatorze lancements prévus d’ici 2025, sept concerneront d’ailleurs des véhicules 100% électriques. «Nous accueillons favorablement toutes les évolutions du secteur pour créer notre propre Nouvelle Vague», explique Luca de Meo, directeur général de Renault depuis le 1er juillet 2020. «Il s’agit de faire entrer l’industrie automobile dans la modernité. Nous allons devenir une marque énergétique en renforçant notre position de leader dans les véhicules électriques avec le projet Electro Pole et en investissant dans l’hydrogène, afin de proposer le mix le plus vert d’Europe d’ici 2025. Nous deviendrons également une marque technologique grâce à notre innovation interne et à la «Software République», un écosystème ouvert dédié au développement d’un savoir-faire européen dans des domaines-clés tels que les données ou la cybersécurité. Cela nous procurera un avantage concurrentiel en tant que marque de service, avec des services connectés high-tech, dans la voiture comme en dehors. Et nous ancrons cette vision dans la modernité en France. Parce que en tant que marque, c’est dans nos racines que se trouve notre âme et que nous puisons notre force.»

Parenthèse enchantée

Electromobilité, hydrogène, cybersécurité, services, on voit que l’industrie automobile est en train de se réinventer. La voiture pétaradante d’antan a définitivement vécu, une page se tourne. Dans ce contexte, un peu déprimant pour les générations ayant eu la chance de connaître l’âge d’or de l’automobile symbole de liberté, les évocations fantasmées du passé font souffler un vent de fraîcheur. C’était le rôle dévolu à la nouvelle R5, dont le prototype dévoilé à cette occasion a mis un peu de piment automobile dans une vidéoconférence consacrée par ailleurs à des considérations très stratégiques et managériales. «Le design de la Renault 5 Prototype s’inspire d’un modèle culte de notre patrimoine», explique Gilles Vidal, le directeur du design Renault, où il a pris la succession de Laurens van den Acker il y a quelques mois. «Ce modèle incarne simplement la modernité, un véhicule ancré dans son temps: urbain, électrique, charmant.»

On reconnaît immédiatement la Renault 5 dans ce projet pourtant résolument contemporain. La prise d’air du capot, par exemple, cache la trappe de recharge de la batterie. Et les antibrouillards intégrés au pare-chocs sont devenus des feux de jour à LED. La Renault 5 électrique ne devrait être commercialisée qu’en 2024, mais on se réjouit déjà.

Economie circulaire

Renault entend aussi «briser le cercle consumériste» et créer de la valeur en reconditionnant les batteries des véhicules électriques défectueuses, en remettant en état des voitures d’occasion et en convertissant des utilitaires à moteur diesel en véhicules 100% électriques ou fonctionnant au biogaz. Ce rôle est dévolu à la Re-Factory. Cette dernière est en cours d’aménagement sur le site historique de l’usine Renault de Flins, à l’ouest de Paris, où furent produits jadis de nombreux modèles légendaires de la marque au losange. Aujourd’hui, son modèle phare est la Renault Zoé.


Un retour vers le futur

La mode des styles automobiles rétro n’a pas attendu la transition énergétique et l’électrification des véhicules pour s’exprimer. Si les voitures ont eu tendance à se ressembler de plus en plus, c’était dû au départ à l’importance croissante du profilage aérodynamique et du travail en soufflerie. Le progrès technologique, notamment en matière d’éclairage et de pneumatiques, a aussi conditionné dans une certaine mesure l’évolution des silhouettes. Enfin, le boom des SUV a sa part de responsabilité dans cette uniformité dont les designers tentent de s’affranchir. Or l’un des meilleurs moyens d’y parvenir, c’est de s’inspirer de modèles mythiques et de les réinterpréter sous une forme contemporaine. En partant de voitures populaires, comme la VW New Beetle, la Mini ou la Fiat Cinquecento (soit dit en passant, les deux dernières sont commercialisées aussi en version 100% électrique). Ou alors de voitures de sport ayant marqué leur époque, à l’instar de l’Alpine A110, de la Chevrolet Camaro ou de la Ford Mustang. DR

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