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Malentendus et craintes autour du Centre suisse Islam et Société prévu à Fribourg

Politique • Le Centre suisse Islam et Société en terre fribourgeoise suscite toujours la méfiance au Grand Conseil. Des députés de droite ont tenté en vain de forcer le Conseil d'Etat à intervenir auprès de l'Université pour faire barrage au projet.

Le rectorat considère que l’échange avec les musulmans représente une contribution aujourd’hui indispensable à une compréhension mutuelle et une intégration réussie. © Keystone (photo prétexte)
Le rectorat considère que l’échange avec les musulmans représente une contribution aujourd’hui indispensable à une compréhension mutuelle et une intégration réussie. © Keystone (photo prétexte)

ATS

Publié le 10.09.2014

Temps de lecture estimé : 3 minutes

Leur mandat parlementaire en ce sens a manqué de peu la majorité qualifiée (56 membres) qui était requise pour passer la rampe. Il a obtenu 52 votes favorables contre 38 oppositions et 2 abstentions.

Les débats ont été vifs et émotionnels. Dans chaque camp, des députés ont fait allusion aux nombreuses victimes actuelles des conflits religieux dans le monde, ou encore à des événements historiques tels que la guerre du Sonderbund.

La gauche a fait front pour défendre ce centre favorisant le dialogue interreligieux. Le PDC, lui, s'est montré très partagé: certains ont l'impression d'avoir été mis devant le fait accompli, et ne sont pas entièrement rassurés sur les objectifs à long terme.

Image erronée

Cette future formation continue, aux contours encore flous, est mal comprise. Le mandat demandait d’intervenir pour que l’Université renonce à créer un «Centre national suisse de formation des imams». Or cet intitulé erroné ouvre la voie aux malentendus.

Les dix signataires (UDC, PDC, PLR) soupçonnent que ce centre constitue un premier pas vers une formation complète à la religion islamique (faculté coranique). Ils craignent aussi que la Faculté de théologie perde de son caractère catholique.

Selon eux, l’Institut de droit des religions offre déjà des possibilités suffisantes. Et ce centre implique des investissements «inacceptables» étant donné les difficultés financières du canton. «Devrons-nous en ouvrir un pour chaque religion ?», a demandé Nicolas Kolly au nom de l'UDC qui a soutenu unanimement le mandat.

Cet argument financier est partagé par le PLR, dont une très large majorité s'est rangée derrière le mandat. «Le canton doit définir ses priorités», a commenté Yvan Hunziker. «Nous avons plus besoin de pharmaciens et de médecins que de gens qui étudient l'islam.»

L'objectif n'est pas de fournir une formation coranique de base; un tel besoin n'existe même pas en termes statistiques, a rectifié Jean-Pierre Siggen, conseiller d'Etat en charge de l'instruction publique.

Un besoin national

Il s'agit d'offrir des connaissances utiles pour que les imams et d’autres personnes de référence des communautés musulmanes puissent mieux s’intégrer dans l'environnement suisse. Le centre s'adresse aussi aux personnes qui, dans leur profession, sont en contact avec des musulmans. Enfin, il formera une relève scientifique apte à présenter une image authentique de l’islam au niveau académique.

Ce projet répond à une préoccupation nationale. C'est pourquoi il bénéficierait d'une contribution fédérale de 250'000 francs par an, montant équivalent à celui fourni par l’Université.

Le volet financier sera précisé ces prochains mois. L'Université n'a communiqué sur ce projet que récemment, a concédé Jean-Pierre Siggen, rappelant toutefois que le dossier est encore en phase de candidature jusqu'à fin 2014.

La demande est réelle du côté des communautés musulmanes, a-t-il dit en réponse à la question d'un député. Leurs représentants au sein du groupe de travail fédéral ont exprimé leur intérêt. Les personnalités controversées ne seront pas les bienvenues dans ce centre, ni les financements de la part d'intervenants musulmans, a-t-il précisé.

«Tout vaut mieux que de faire l'autruche comme l'ont fait certains pays», a souligné la députée PLR Antoinette de Weck. Elle estime que ce centre serait de nature à montrer que les musulmans «peuvent s'intégrer dans notre société sans trahir leur religion».

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